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Au Cambodge, le combat d’un moine pour sauver les forêts

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Bun Saluth a pour la première fois entendu parler de changement climatique lorsqu’il étudiait les enseignements de Bouddha. « Il nous apprend que rien n’est permanent », explique ce moine cambodgien de 42 ans. Après une enfance passée à la ferme familiale d’Otdar Mean Cheay, dans le nord-ouest du Cambodge, Bun a décidé de devenir moine. Sa formation l’a mené jusqu’en Thaïlande, ravagée par la déforestation, où il a découvert, auprès d’un groupe de moines, que bouddhisme et protection de la nature allaient de pair. « Quand Bouddha était encore en vie, il utilisait l’abri des arbres et des grottes afin de parvenir à l’illumination, explique-t-il. De cette façon, il nous a appris à aimer la nature et les animaux. »

En février 2002, après avoir étudié pendant cinq ans, Bun est revenu dans sa province natale, avec un groupe de moines. En une trentaine d’années, cette ancienne zone militaire longeant la Thaïlande était devenue l’une des nouvelles frontières des affairistes souhaitant s’accaparer ses forêts, dont les bois de construction étaient très prisés sur les chantiers (au Cambodge, la forêt primaire ne recouvre plus que 57 % du territoire national, contre 73 % en 1990, selon l’ONU). « Au début, j’ai eu peur, se souvient Bun Saluth. Nous n’étions que des moines à protéger cette forêt, pourtant sous contrôle de l’Etat, et nous avons dû creuser un fossé tout autour pour la protéger des convoitises des riverains, qui coupaient les arbres. Puis à partir de 2008, à force de persuasion, les villageois ont commencé à venir nous épauler. »

Le groupe de Bun Saluth les a, depuis, initiés aux arcanes d’une gestion plus durable et à la récolte de champignons, patates sauvages et miel, afin de les vendre ensuite sur les marchés des environs. « Aujourd’hui, nous sommes soutenus par les habitants des huit villages situés en bordure de la forêt », résume Bun fièrement. Nombre d’entre eux se sont d’ailleurs portés volontaires pour rejoindre le comité de gestion de la forêt. En compagnie des moines, ils patrouillent afin d’empêcher le déboisement illégal et le braconnage des éléphants, tigres d’Indochine, léopards, ours malais et macaques à queue-de-cochon qui y vivent toujours.

Au total, Bun Saluth a réussi à sanctuariser 18 620 hectares (soit les trois quarts de la forêt de Fontainebleau), faisant de la Sorng Rokavorn Monk Community Forest la plus vaste forêt cambodgienne gérée par ses riverains. Pour ce travail, il a reçu en 2010 le prix Equateur, décerné par le Programme des Nations unies pour le développement. « Notre pays vient de se lancer dans une opération “Zéro faim” d’ici à 2025, insiste-t-il. Grâce aux ressources offertes par des forêts communautaires préservées, de plus en plus de villages atteindraient l’autosuffisance alimentaire. » Dans un pays où 90 % des habitants sont bouddhistes et où 45 % des enfants souffrent de malnutrition, ce message commence à être entendu : »«Si nous n’agissons pas, les uns et les autres, quand nous le pouvons, qui d’autre le fera ? »

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