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Matthieu Ricard sur le bouddhisme, l’altruisme… et l’économie

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Je ne voulais pas laisser la semaine se terminer sans vous parler d’un événement auquel j’ai assisté, mardi matin dernier, à savoir une conférence prononcée par Matthieu Ricard, moine bouddhiste, auteur, blogueur, traducteur et photographe, qui était de passage à Montréal pour quelques jours. Surtout que, comme j’en parlais encore hier, on se rend de plus en plus que l’on va souvent trop vite, et que l’on gagnerait souvent à respirer et à réfléchir un peu… Matthieu Ricard, français d’origine, est le fils de l’auteur et philosophe bien connu Jean-François Revel, avec lequel il avait d’ailleurs co-signé le livre « Le moine et le philosophe ».

Matthieu Ricard, lors d'un événement au profit de la fondation Mathieu-Lafond, à Montréal mardi dernier.
Matthieu Ricard, lors d’un événement au profit de la fondation Mathieu-Lafond, à Montréal mardi dernier.
Et, avant de continuer davantage sur Matthieu Ricard et ses propos, un mot sur l’événement dans le cadre duquel il parlait mardi dernier, et de l’organisme au profit duquel il était organisé, à savoir la Fondation Mathieu-Lafond. Mathieu Lafond était le fils de Robert Lafond, président et fondateur de Lafond et associés, firme conseil en stratégie financière, et fort connu dans le milieu des entreprises en communications, avec lesquelles il travaille beaucoup. Mathieu Lafond est décédé dans le fameux tsunami du 26 décembre 2004, en Thaïlande où il voyageait, et non sans avoir sauvé la vie de plusieurs personnes qui l’accompagnaient. En sa mémoire, sa famille a créé la Fondation Mathieu-Lafond, dont la mission est de venir en aide aux jeunes en difficultés, âgés entre 5 et 25 ans, à la fois ici et en Thaïlande.

Étant donné cette mission, la participation de quelqu’un comme Matthieu Ricard était un « fit » parfait: celui-ci, en plus d’écrire des livres, de donner des conférences, d’exercer la photographie et de bloguer, se consacre à de nombreux projets humanitaires, voués à l’aide aux populations dans les régions himalayennes (cliniques, écoles, orphelinats, maisons de retraite et de soins pour les personnes âgées, construction de ponts, formation professionnelle) et à la sauvegarde de l’héritage culturel tibétain. Ajoutons que sa mère était aussi une artiste connue (la peintre Yanhe le Toumelin), que celui-ci a grandi dans un milieu intellectuel d’assez haut niveau, et qu’il a étudié la génétique cellulaire à l’Institut Pasteur sous la direction de François Jacob, prix Nobel de médecine. En 1967, il s’est rendu en Inde pour y rencontrer les grands maîtres spirituels du Tibet. Et c’est après avoir terminé sa thèse de doctorat en 1972, qu’il s’est consacré à l’étude et à la pratique du bouddhisme

Et mardi dernier, devant une clientèle composée en majorité de gens d’affaires, (dont beaucoup du milieu des communications), Matthieu Ricard prononçait une conférence qui avait été annoncée sour l’improbable titre « Économie et altruisme ». Et, oui, il a fait entre les deux des liens qui se tiennent, et qui n’ont même pas l’air tirés par les cheveux. En relisant les quelques notes prises à la volée, je me rends d’ailleurs compte qu’il y a bien des éléments, dans cette conférence riche en contenus, que j’aimerais récupérer. J’y reviendrai peut-être.

Mais d’ici là, allons-y pour ce qu’il m’en est resté pour l’instant. Donc, économie et altruisme peuvent-ils être conciliés. Poser la question de l’altruisme, a d’abord fait valoir Matthieu Ricard, c’est poser la question du long terme par rapport au court terme. À court terme, on se préoccupe de résultats immédiats, et de rentabilité; on raisonne donc en termes, au mieux, de quelques années. À moyen terme, on tient compte de la qualité de vie (la nôtre, celle de nos proches et de notre entourage); et donc, on réfléchit dans un cadre de quelques décennies. Et c’est quand on regarde à long terme que l’on se préoccupe de l’environnement, et donc de ce qui pourrait arriver dans un intervalle qui va vraiment dépasser la période de notre vie.

Réconcilier le court, le moyen et le long terme, ce sont aussi des questions qui se posent dans la gestion des entreprises. Et Matthieu Ricard s’est penché sur la question, entre autres sous l’angle de l’économie: il a, depuis quelques temps, ses entrées à Davos, et a décortiqué les travaux d’experts qui se sont eux aussi penchés sur la question. On se rend compte, a-t-il souligné, que les entreprises qui mettent de l’avant une mission sociale supportent mieux les crises. Il a aussi fait ressortir que, alors que bien des économistes, ces dernières années, ont fait ressortir la thèse comme quoi il n’y avait pas de place pour l’altruisme dans une question comme l’économie, bien des grands penseurs, entre autres Adam Smith, accordaient au contraire énormément d’importance à des notions comme la coopération. Et d’entrée de jeu, Patrick Beauduin, de l’agence Cossette, qui se chargeait d’introduire la conférence de Matthieu Ricard, avait terminé sur cette citation: »Une entreprise qui ne crée que de l’argent est une entreprise médiocre. » Son auteur? Henry Ford. Mais en cette époque qui est la nôtre, il semble qu’on puisse désormais bénéficier de certaines notions introduites par la sagesse orientale, pour nous aider à retrouver un certain recul, et avec lui une notion plus juste des réalités et des proportions.


Source : Le blog de Marie-Claude Ducas




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