Comme dans la plupart des autres religions, nombreuses sont les nonnes qui souhaiteraient obtenir l’ordination complète. Mais la même question se pose toujours : « Pourquoi les hommes le peuvent, et pas les femmes ? » Une réelle question du XXIème siécle.
Déjà, à l’origine, le Bouddha était convaincu du danger d’intégrer les femmes à la vie monastique : » Ananda, si les femmes n’avaient pas obtenu (le droit) d’entrer dans la vie sans demeure selon ce Dhamma et cette discipline, la vie sainte aurait duré longtemps, le véritable Dhamma aurait duré mille ans. Mais maintenant que les femmes ont ce droit, la vie sainte ne durera pas longtemps, le véritable Dhamma ne durera que cinq cents ans. » (*)
Ainsi, au fil des siècles, les règles régissant l’ordre des moines augmentèrent, rendant la condition des nonnes bien moins avantageuse que celles des moines. Par exemple, pendant longtemps la tradition voulait que les nonnes soient ordonnées seulement par des femmes, ayant plusieurs années d’expérience. (Un moine confirmait ensuite leur ordination.) Mais comme certaines régions étaient complètement dépourvues de moniales, cette règle favorisa leur raréfaction (au Tibet et au Japon par exemple).
Aujourd’hui, leur vie est différente selon les pays, les monastères, les traditions… Mais dans l’ensemble, elles restent nettement défavorisées. Car malgré l’ordination complète des femmes approuvée par le Bouddha lui-même, celle-ci n’est pas reconnue ou acceptée partout. Or, une nonne ne peut être considérée comme membre de la Sangha (la communauté monacale) sans cette pleine ordination. Surtout, les possibilités d’éducation, d’enseignement, les aides matérielles… sont alors bien moins importantes. Sans parler de la considération des autres moines…
Dans la tradition tibétaine par exemple, les nonnes ne peuvent toujours pas recevoir l’ordination complète. Néanmoins, grâce au soutien du Dalaï-Lama, six couvents ont été construits, uniquement destinés aux femmes.
C’est que, désirant faire évoluer la situation, des nonnes ont crée leurs propres mouvements, telle la fameuse association Sakyadhita International mise en place par la bhiksuni (nonne ayant reçu l’ordination complète) Karma Lekshe Tsomo.
Fondée en 1987 en Inde (à Bodhgaya), l’association a pour objectif principal « de promouvoir l’éducation au plus haut niveau, l’ordination et l’accomplissement des idéaux bouddhistes pour l’ensemble des femmes bouddhistes du monde entier ».
Ainsi, au Sri Lanka, une première avancée s’est faite en 1996, 10 femmes recevant l’ordination complète. En 98, au cours d’une grande cérémonie d’ordination à Bodhgaya, 22 femmes furent à leur tour ordonnées. Et, après 1000 ans d’interruption, l’Ordre des Nonnes est à nouveau reconnu au Sri Lanka. C’est d’ailleurs là-bas que vit la plus grande communauté de nonnes bouddhistes( qui compterait aujourd’hui 400 Bhikkhunis et 800 Samaneris, nonnes-novice)
Mais il reste encore beaucoup à faire…En juillet prochain, un congrès scientifique international avec des représentants de toutes les traditions bouddhistes doit avoir lieu à l’université de Hambourg : au programme, un état des lieux de la recherche pour la réintroduction de l’ordination des Bhiksuni.
(*) »le Bouddha historique » de M Hans Wolfang Schuman, Edit. Sully
Clémence de la Robertie pour www.buddhachannel.tv