Le 26 décembre 2004 restera pour les habitants d’Arattupuzha, une journée qui marquera leur vie. A cette date, le tsunami a frappé les côtes de leur village et a tué 36 personnes. D’autres ont été sérieusement blessées, non seulement physiquement mais aussi émotionnellement, et la plupart ont vu leur maison s’écrouler.
Prenez un train pour Changanacherry (Kerala), un deuxième pour Kayakulam, ensuite deux bus différents pour Kotchidejetty et finalement un bateau pendant quinze minutes, et vous atteindrez le petit paradis d’Arattupuzha.
Accompagnée de Benzi, coordinatrice des projets côtiers au Kerala depuis deux ans, nous sommes arrivées au centre Ekta qui travaille depuis 4 ans sur cette zone, et avons été reçues par nombre d’enfants nous souhaitant la bienvenue en nous offrant des colliers de fleurs et de l’eau de coco. C’était un samedi, jour où les enfants venant de différents Kuttikootam (clubs) se réunissent pour échanger à travers différentes activités telles la peinture, le chant, la danse, le jeu, etc. Dans ce village, 20 jeunes travailleurs pour la paix formés par Ekta Parishad et la SAPA s’occupent de 250 enfants chaque weekend. Les enfants sont aussi sensibilisés à travers différentes activités auxquelles ils participent, à la non violence et les principes de paix. En partageant du temps ensemble, ils apprennent petit à petit comment s’organiser en donnant de l’importance à chaque voix. Par exemple, ils ont décidé ensemble, qui allait chanter pour nous souhaiter la bienvenue, qui allait présenter leurs activités, etc. Après cette rencontre et après avoir serré nombre de petites mains, nous les laissons à leurs activités et nous nous rendons à une réunion de femmes.
Marcher jusque la maison où a lieu la réunion a été un réel voyage. Nous avons suivi des petits chemins à travers une végétation luxuriante, si verte, avec de petits ruisseaux de toute part, des fleurs aux couleurs vives, des cocotiers et autres arbres exotiques remplis de fruits dont je ne pourrais vous dire le nom. Au milieu de ce paradis, nous sommes aussi passées devant un refuge où 180 personnes ont été logées après le tsunami pendant un an et demi et où 8 familles y vivent encore aujourd’hui.

Arrivée à destination, nous avons été reçues par un groupe de femmes. Quatre d’entre elles, Deepam, Sulada, Suja et Shilarajel sont présidentes d’un groupe de création de revenus (livelihood group). Shilarajel est aussi la présidente du Comité de Coordination de ces groupes. A ce Comité, participent dix femmes représentant dix groupes différents. Cette initiative a été soutenue par Ekta Parishad après le tsunami, dans le but de donner du pouvoir aux femmes et de créer de nouvelles ressources économiques pour les familles affectées par le tsunami. Les femmes nous expliquent qu’avant le désastre, la pêche était suffisante pour les faire vivre relativement correctement mais depuis la catastrophe, les ressources halieutiques ont diminué et ils ont donc du s’organiser pour trouver d’autres manières de gagner leur vie.
Aujourd’hui, les groupes se concentrent sur quatre activités principales :
⇒ Création de sacs à partir de papiers journaux et papiers cadeaux,
⇒ Unité de couture fabricant entre autre des sacs à mains,
⇒ Production de savons, shampoings et détergents 100% naturel faits à partir d’huile de noix de coco,
⇒ Cuisine de pickles (conserves au vinaigre servant de condiment) de poisson, citron, mangue, gingembre, ail, etc.,
⇒ Fabrication de poudre brahmi (très utilisée dans la médecine ayurvédique)
Ces occupations leur permettent non seulement d’améliorer leurs revenus mais aussi de gérer par elles-mêmes des activités économiques au sein de la communauté. A travers cela, elles ont gagné confiance en elles et veulent maintenant développer ces activités. Le mois prochain, se déroulera une réunion du village où l’objectif sera pour elles de fournir les 6.000 familles en savon en les convainquant d’acheter ce type de produits localement. Un autre de leurs projets est de commencer à cultiver du riz sur leurs petites parcelles de terre pour leur propre consommation, et devenir autosuffisant pour cette céréale.
Ces femmes sont un exemple vivant de comment se battre et reconstruire un monde dans la solidarité.
Arattupuzha n’est pas juste un endroit paradisiaque, c’est aussi et surtout un paradis humain où les hommes, femmes, jeunes et enfants connaissent par expérience du quotidien le sens du mot Solidarité.
Par Elodie Kergresse
Ekta Parishad