Accueil Espace Bouddhiste Science Neurosciences et bouddhisme – Trinh Dinh Hy

Neurosciences et bouddhisme – Trinh Dinh Hy

177
0

Neurosciences et bouddhisme


Trinh Dinh Hy

Le cerveau humain est probablement l’objet le plus complexe, le plus subtil, le plus
extraordinaire qui puisse exister dans la nature. C’est aussi l’organe le plus élaboré, le plus abouti dans l’évolution des espèces. Pour l’instant seulement, car comme pour l’espèce humaine, rien ne nous dit qu’il dominera encore le monde dans quelques millions d’années…

Le lien secret qui le relie à l’esprit, qui existe entre le corps et l’esprit, appelé le
«noeud du monde» par Schopenhauer, a toujours fasciné les hommes et demeure entouré d’un voile de mystère.
L’étude de l’esprit, la psyché, a débuté dès l’Antiquité lorsque la psychologie se fut
détachée de la philosophie. Ce n’est qu’au XVIè s. qu’est apparue la neurologie avec les premières descriptions anatomiques du cerveau par Vésale, et à la fin du XVIIIè s., la psychiatrie, avec la libération des aliénés de leurs chaînes et la classification des maladies mentales par Pinel.

Enfin, les véritables sciences du cerveau, les neurosciences, n’ont pris leur essor que
depuis quelques dizaines d’années, grâce à la progression fulgurante de l’imagerie médicale et des explorations fonctionnelles. Le cerveau vivant n’est plus cette «boîte noire» fermée et inaccessible, mais un organe dont on peut observer et mesurer le fonctionnement.

Les neurosciences seraient-elles en passe de devenir les «sciences du XXIè siècle»?

Ecoutons deux des esprits scientifiques les plus éminents de notre époque.
Pour François Jacob, prix Nobel de médecine en 1965, «Nous sommes un redoutable
mélange d’acides nucléiques et de souvenirs, de désirs et de protéines. Le siècle qui se
termine s’est beaucoup occupé d’acides nucléiques et de protéines. Le suivant va se
concentrer sur les souvenirs et les désirs. Saura t-il résoudre de telles questions?»
Francis Crick, prix Nobel de médecine en 1962, est encore plus catégorique: «Le XXè
siècle est le siècle de la génétique. Le XXIè siècle sera celui des neurosciences». C’est ainsi que celui qui a introduit une véritable révolution scientifique en découvrant le code génétique à travers la structure de l’ADN, a changé l’orientation de ses recherches et consacré les 30 dernières années de sa vie à l’étude neurobiologique de la conscience.
Bien sûr, nous ne sommes qu’aux balbutiements, qu’au tout début d’une grande
aventure. Comme le dit Crick, «les sciences du cerveau ont encore un très long chemin à faire. Mais la fascination du sujet et l’importance des réponses les porteront inévitablement de l’avant. Il est essentiel de comprendre nos cerveaux de façon assez détaillée, si nous voulons évaluer correctement notre place dans cet univers immense et complexe qui nous entoure».

Dès lors, comment faut-il comprendre la déclaration attribuée à André Malraux «Le
XXIè siècle sera spirituel ou ne sera pas»? Dans le sens d’un retour à la spiritualité classique, c’est-à-dire aux religions traditionnelles, ou dans le sens de l’émergence d’une spiritualité séculière, comme l’entend le Dalaï Lama?

Personnellement, je serais enclin à penser que l’un et l’autre partagent la même vision:
le XXIè siècle sera celui où l’esprit, au sens large, occupera une place centrale dans les
préoccupations humaines.

Le rapprochement des neurosciences et du bouddhisme a commencé en 1987, avec la
création de l’Institut Mind and Life (Esprit et Vie), sous l’impulsion d’Adam Engle, avocat et entrepreneur américain et de Francisco Varela, chercheur en sciences cognitives francochilien, lui-même pratiquant bouddhiste de longue date.

Le but de départ était d’instaurer un dialogue, de construire des « passerelles » entre
les neurosciences et la spiritualité bouddhique. Puis l’expérience s’est montrée tellement passionnante et enrichissante, que chaque année des spécialistes en neurosciences, en psychologie, en philosophie, continuent à se réunir autour du Dalai Lama, tantôt à Dharamsala, tantôt aux Etats-Unis, pour discuter des sujets aussi divers que les relations entre les fonctions mentales et la spiritualité, la méditation et l’éthique sociale.

neuroscience_bouddhisme.jpg

Lors de la première conférence en 1987, le Dalai Lama ouvrit le débat en ces
termes: «Tout d’abord, faites des investigations sur les effets positifs de la méditation. Si vous la trouvez couronnée de succès, veuillez l’enseigner à votre société de manière purement séculière, afin que tout le monde puisse en bénéficier».

Il ajouta encore: «Il ne s’agit pas d’une affaire de foi et de croyance, mais plutôt d’une
préoccupation éthique et morale. Il est de notre responsabilité d’être humain d’utiliser notre intelligence pour comprendre la nature et le fonctionnement de notre esprit».
C’est dans cet esprit que des pratiquants religieux et laïcs de la méditation ont
collaboré à des expériences neuroscientifiques menées dans des laboratoires hautement spécialisées, avec des résultats encore parcellaires mais prometteurs.

pour la suite de ce texte : http://cusi.free.fr/fra/tnp_Neurosciences_et_Bouddhisme/tnp_Neurosciences_et_Bouddhisme.pdf

Previous articleMaître Dôgen — Faut-il avoir un Maître?
Next articleLa biodiversité envahit les villes