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Les stupas de glace : « Une réponse himalayenne à un problème hymalayen »

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Dans le froid sec de ce début d’hiver, un désert de terres arides s’étend au pied de l’imposant monastère du village de Phyang, petit hameau bouddhiste niché sur le haut plateau himalayen du nord de l’Inde, non loin de Leh, la capitale du Ladakh.

Sonam Wangchuk, de l’âge de 49 ans, à la fois ingénieur, inventeur et éducateur, rêve d’apporter ici une solution aux problèmes d’irrigation des paysans. Et de faire jaillir eau, arbres et champs, sur ces terres frappées de plein fouet par le réchauffement climatique.

Pour cela, il a imaginé de détourner l’eau du ruisseau du village, inutilisée durant l’hiver, pour alimenter l’érection de glaciers artificiels. « Je veux offrir une réponse himalayenne à un problème himalayen », résume Sonam Wangchuk.

En ce début du mois de novembre, l’homme est de bonne humeur. C’est le lancement de son chantier d’hiver. L’objectif est de créer un réservoir géant où l’eau, conduite par des canalisations depuis le ruisseau en altitude, jaillit en fontaine et gèle au contact de l’air, quand la température oscille entre – 10 °C et – 20 °C

Sur un dôme recouvert de branchages, l’eau gelée finit par former un cône gigantesque, superbe sculpture de glace. « C’est l’harmonie entre la technologie et la nature », commente Sonam Wangchuk.

En mars, la pyramide pourra atteindre 20 mètres de large et 40 de haut, et pourrait stocker 16 millions de litres d’eau. « Il devrait commencer à se dissoudre durant la saison sèche d’avril et mai, avant la fonte des glaciers naturels, et permettra d’irriguer les environs », poursuit l’inventeur.

L’an dernier, le glacier qu’il a réalisé ne s’est désagrégé que le 18 mai. Et 5 000 arbustes ont pu être plantés sur une parcelle du désert qui appartient aux moines de Phyang. « L’idée finale est de générer des revenus pour les villageois, en leur permettant de développer des champs, mais nous ne voulions pas leur donner de faux espoirs », souligne Sonam Wangchuk.

Le projet expérimental est donc confiné, pour l’instant, à un partenariat avec le monastère. Et Sonam Wangchuk a été prompt à baptiser son invention « le stupa de glace », par analogie à l’architecture des monuments bouddhistes. « Rattacher cette technologie à la religion est un moyen de l’installer dans les villages », estime-t-il.

Cette année, il va tenter d’ériger entre trois et sept pyramides, mais à terme, l’objectif est d’en implanter 90, à Phyang.« Au Ladakh, on ne peut échapper à la désertification liée au changement climatique », rappelle l’ingénieur. Les précipitations et les températures sont perturbées. Résultat, l’étendue des glaciers himalayens rétrécit, dans ces vallées où les cultures, telles des oasis, déclinaient auparavant orge, blé, moutarde, luzerne, abricots, pommes, noix ou légumes.

Fidèle à son caractère, qui a inspiré un film populaire de Bollywood, Sonam Wang­chuk bouillonne d’idées pour la suite. Il rêve de voir s’élever une « ville verte », sur les 600 hectares de désert de Phyang, et développe déjà le projet d’une université dédiée aux enjeux d’adaptation dans l’Himalaya.

Nommé, en 2001, « homme de l’année » par le magazine The Week, pour son apport révolutionnaire dans l’éducation des jeunes du Ladakh, il voudrait aussi lancer un tourisme d’hiver et même intégrer des chambres dans les dômes de glace…

En attendant, Sonam Wangchuk s’apprête, avec quatre disciples, à passer un hiver rude à Phyang, pour surveiller la formation de ses étranges stupas. La solitude est le prix de son rêve.

Source: La Croix


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