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Hubert Reeves: «La science et la religion ne sont pas incompatibles, mais il vaut mieux les séparer»

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07.09.2010

INTERVIEW – L’astrophysicien franco-québécois répond aux questions de 20minutes.fr au sujet du nouvel ouvrage de Stephen Hawking qui paraît jeudi…

L'astrophysicien franco-québécois, Hubert Reeves, le 8 mars 2005, à Paris
L’astrophysicien franco-québécois, Hubert Reeves, le 8 mars 2005, à Paris

Un feu de paille. C’est ainsi qu’Hubert Reeves qualifie la polémique autour du nouveau livre de Stephen Hawking, dans lequel l’astrophysicien britannique remet en cause l’origine divine de la création de l’univers. Pour son confère franco-québécois, cette thèse est «un peu naïve» et «ne fait pas beaucoup avancer les choses». Entretien.

La thèse de Stephen Hawking est-elle nouvelle?

Non, ce n’est pas quelque chose de nouveau et cela me pose problème. Hawking suppose qu’au commencement, il y avait la gravité. Cela n’explique pas ce qu’il y avait avant. Hawking ne fait que relancer le débat: qu’est-ce qu’il y avait avant et d’où vient la gravité?

Est-ce alors la renommée internationale de Stephen Hawking qui donne de l’ampleur à cette affaire?

Oui, il y a une entreprise médiatique très importante autour de lui. Stephen Hawking est un excellent scientifique, mais je ne suis pas certain qu’il soit à l’origine de ces propos (son ouvrage est co-écrit avec le physicien Leonard Mlodinow, ndr).

Y a-t-il une confusion entre la science et la foi dans ses propos?

Oui, parce que la science ne peut pas répondre à la question de Leibniz: Pourquoi y-a-t-il quelque chose plutôt que rien? Elle ne peut pas dire non plus si telle chose est bonne ou pas bonne, ce n’est pas son domaine, son champ d’action. La science relie une chose à une autre chose, ce sont des «pourquoi emboîtés».

La science et la religion sont-elles donc incompatibles?

Elles ne sont pas incompatibles, mais il vaut mieux les séparer. La science vous dit comment faire les choses, comment cela fonctionne. Par exemple, elle vous donne les recettes pour faire des OGM ou des nanotechnologies, mais elle ne vous dit pas s’il est bon de les utiliser. Les questions de valeurs, du bien ou du pas bien, c’est du domaine de la religion. Celle-ci offre un point de vue hautement subjectif, elle ne peut rien prouver, alors que la science, elle, est objective. Ce sont deux discours différents. Cela n’empêche pas pour autant un très bon scientifique d’être croyant ou athée.

La science a-t-elle tout de même déjà pris le pas sur la religion?

Concernant la création de l’univers, on n’a pas avancé d’un pouce depuis des millénaires. Mais la bible n’est pas pour autant un livre scientifique, c’est un livre de sagesse, de croyances. Il s’agit de contes et légendes qui préexistaient et dont la bible s’est servie pour faire des contes moraux. Il y a justement des problèmes quand il y a des intrusions, quand la science ou la religion sortent de leur domaine. Ce fut le cas entre Galilée et les Dominicains qui ont, au nom de la religion, cherché à imposer comment le monde était fait. Galilée leur a répondu: «Dites-nous comment on va au ciel et laissez-nous vous dire comment va le ciel.»

Les questions autour des croyances ont-elles alors raison de se poser?

Oui, moi-même je me pose beaucoup de questions sur le sens de la vie, son existence. Elles se posent à tout le monde. Cet ensemble de questions reste profondément mystérieux et il faut vivre dans le mystère. Je ne crois pas qu’on puisse arriver à des réponses satisfaisantes. Moi-même, je reste dans l’interrogation.


Propos recueillis par Corentin Chauvel

Source : www.20minutes.fr

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