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La rénovation du centre de Lhassa suscite des inquiétudes

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Le cri d’alarme lancé par Woeser, l’écrivaine tibétaine dissidente basée à Pékin, le 7 mai sur son blog au sujet de la destruction du centre de Lhassa a fait du chemin : il a notamment poussé à l’action les tibétologues étrangers, soucieux de rappeler à la Chine ses engagements alors que se tient jusqu’au 27 juin au Cambodge la 37e session du Comité du patrimoine mondial de l’Unesco. Ceux-ci ont fait circuler en ligne une pétition signée par 138 spécialistes du Tibet à travers le monde. Elle est adressée au président chinois Xi Jinping et à la directrice générale de l’Unesco, Irina Bukova. Une autre pétition a également été lancée par la « nonne chantante » Ngawang Sangdrol, une ancienne prisonnière politique exilée à Boston. Elle compte à ce jour près de 98 000 signataires.

Photo de la rénovation du vieux centre de Lhassa publiée sur le blog de la dissidente tibétaine Woeser | DR
Photo de la rénovation du vieux centre de Lhassa publiée sur le blog de la dissidente tibétaine Woeser | DR

Le Potala, le palais des dalaï-lama, a été désigné comme un site appartenant au patrimoine mondial de l’Unesco en 1994. Il a été rejoint en 2000 et 2001 par le temple du Jokhang et le Norbulinka, le palais d’été du dalaï-lama. Régulièrement sous surveillance en Chine et censurée (son blog est en chinois mais bloqué en Chine), Woeser avait souhaité attirer l’attention sur tout une série de projets de rénovation et de remodelage dans Lhassa, notamment autour du Jokhang et sur le Barkhor, le « chemin rituel » qui entoure le temple le plus sacré du bouddhisme tibétain à travers un dédale de petites rues commerçantes. Or, le manque de transparence des autorités locales, les précédents chinois en matière de rénovation urbaine à la hussarde en zones chinoises ou « ethniques », et le contexte politique extrêmement tendu du Tibet, rendent ces soupçons éminemment légitimes. Le seul cas d’immolation répertorié à Lhassa, le 27 mai 2012 par deux jeunes Tibétains, avait en outre eu lieu devant le Jokhang, confirmant aux yeux des autorités chinoises la nécessité de « sécuriser » davantage ces quartiers tibétains.

LE BARKHOR DÉFIGURÉ

Sur son blog (traduit ici en anglais), l’écrivaine décrit le spectacle affligeant des rues de la vieille ville de Lhassa et du Barkhor, chemin de circumambulation emprunté quotidiennement par les pèlerins et rendues impraticables – certes de manière temporaire – par des travaux de canalisations et de « modernisation » à la chinoise.Elle s’indigne de la construction d’un centre commercial avec parking souterrain à la périphérie du Barkhor.

Woeser affirme que les commerçants tibétains qui tiennent des étals le long du Barkhor devront déménager dans le nouveau centre commercial et que les résidents de la vieille ville seront relogés dans une banlieue à l’ouest de la capitale de la Région autonome tibétaine. Une partie des demeures rénovées seront proposées aux plus offrants pour créer restaurants, bars et galeries.

Woeser rappelle le précédent du village de Shol, situé au pied du Potala : il fut rasé et déplacé deux ans après l’inscription du Potala sur la liste de l’Unesco. Et le Potala fut « fatalement défiguré par l’une de ces répliques de places identiques à travers la Chine, dont le but est de montrer et de projeter le pouvoir et l’autorité suprême ». En 2002, un monument « pour la libération pacifique du Tibet », qu’elle décrit « sous forme d’obus », a ensuite rejoint la place. Le programme de rénovation en cours, lancé fin 2012, a été assez largement présenté dans la presse locale et nationale en chinois : le Tibet Daily mettait ainsi en avant en décembre le comité de surveillance mis en place pour s’assurer du respect du patrimoine historique lors des travaux, qui doivent s’achever fin juin.


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