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Une approche comparative historique du phénomène religieux

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Après une analyse étymologique rapide, le fait religieux, est replacé dans son évolution proto-historique et historique corrélative à l’évolution humaine. Il est lui-même en devenir et oscillera, à partir de quatre rameaux « premiers », entre les deux grands axes du polythéisme et du monothéisme, non sans conflits, ni sans échanges….

Ce travail veut contribuer, par une analyse de l’évolution historique à rapprocher les diverses expressions religieuses, issues d’un « fonds commun » pour un dialogue apaisé.

1 – Etymologie :


Religieux et religion, ces termes apparaissent dans la langue française vers 1085 à partir du latin  «religio» .

L’ étymologie en reste controversée.


Il y a en effet plusieurs sens possibles.


Pour un premier ensemble, d’experts ; en gros, selon les auteurs chrétiens, il est proposé de trouver dans «  re – ligare » (re-lier), divers sens de ce terme.


Le premier est celui exprimant la relation : avec le sacré, le divin ; ce sens s’exprime aussi dans la relation avec la communauté des fidèles.

Un autre sens est celui de dépendance, d’attache (de lien, lier/lien); on y trouvera alors à la fois les aspects: attachement (lien affectif) et rattachement (lien effectif).


Selon des auteurs latins tardifs, et notamment Cicéron ; on rattache le terme à « legere» au sens de ramasser, cueillir et, par extension assembler et le préfixe « re » exprimera la notion de retour en arrière, donnant donc : (se) recueillir, récollection, (se) ramasser, avec une acception de retour (sur soi) et de concentration (recueillement).


En latin classique « religio » est synonyme de scrupule, de soin (méticuleux même). Ce sens pouvait donc, à l’origine, exclure une idée de relation au sacré, ou être beaucoup plus général. Il n’était donc pas nécessairement question de sens relevants, à l’origine, du domaine du sacré.


Rapidement cependant il y aura limitation du terme à l’observance stricte d’un protocole, d’un rituel, d’un culte; de manière littérale et vigilante.

Ceci a pu être acquis par élargissement et recouvrement par transfert à partir du domaine profane vers l’ensemble des pratiques d’obligations morales et d’adhésion (objective et subjective) à un credo.


En tout état de causes un vocable s’est donc, assez tôt, spécialisé en Occident chrétien, à la différence d’autres idiomes ailleurs dans le monde (y compris indo – européens) pour y distinguer l’appareil des croyances, et des rites qui y référaient ; et cela, insistons-y, à part de toutes les autres institutions et pratiques sociales.


C’est ainsi qu’on a abouti en Occident à la distinction d’un domaine « religieux » ; qui ailleurs dans le monde n’a jamais été pensé à part.

La plupart des sociétés archaïques, ailleurs, n’isolent pas la sacralité de la socialité. La constitution du lien social reste, en effet, substantiellement et intrinsèquement religieuse dans les sociétés dites « primitives ».


En Occident chrétien ; dès le haut moyen âge (V°siècle) « religio » distinguera même plus précisément la profession de foi ; puis plus tard (1143) l’ordre religieux et la discipline monastique ; et, on en arrivera à désigner ainsi au XIII° siècle l’ensemble des vérités et devoirs du domaine sacré. Sens général encore maintenant usuel.

2 – Aspects de la religion à travers le vocabulaire religieux:


Il y a souvent un aspect dialectique dans le vocabulaire religieux et connexe.

Ainsi, on peut distinguer deux domaines le naturel et le surnaturel ; mais aussi nature et technique, ou encore séparer et opposer le matériel et le spirituel, ou réalités et mythes ; autrement dit le profane et le sacré, corps et esprit (eros et psyché).

De même on va opposer ou juxtaposer : clerc et fidèle, avec une connotation accentuée sur ces termes avec mystique et prosélyte ; et aussi révélation et occultation (caché), ou exotérisme et ésotérisme.

Liberté et obligations, morale et éthique, tradition et prophétisme ; de même feront plus ou moins bon ménage.

Enfin, cultes et rites (de passage, et parfois syncrétismes) ; symbolisme (union) et diabolisme (division) ; macrocosme et microcosme complètent cette revue rapide des principaux termes de la dialectique.

On pourrait la compléter avec l’anthropocentrisme et les différentes déclinaisons de l’expression religieuse qui, comme le rire, est un « propre » de l’Homme.


Nous insisterons un peu plus sur le terme de « secte », dont dérive sectarisme (var. intégrisme, var. communautarisme). Ce terme a repris une actualité forte, après une certaine éclipse, comme à chaque période historique de changements de systèmes de valeurs ; quand il y a perte de signification de valeurs culturelles dominantes.

Le terme de secte acquiert le sens de « coupure », par rapprochement avec le latin « sectio » , (secare= sectionner, couper) vers 1230 ; et désigne un groupe constitué à l’écart d’une église pour soutenir des opinions théologiques divergentes.

Auparavant, et depuis longtemps (depuis le bas empire et le haut moyen âge), ce terme ne désignait en fait qu’un ensemble (« sete ») à dévotions un peu particulières (au sens de « chapelle »), mais sans nécessairement reposer sur une intention de coupure définitive.

Ce n’est que relativement récemment, sous l’influence de l’anglais (« sect ») que le terme a désigné des organisations fermées, organisées, exerçant une pression psychologique et/ou physique forte sur ses membres, en vue de les couper d’idées et de contacts extérieurs, et se réclamant d’une pensée religieuse, ou mystique, démarquée ou étrangère par rapport aux religions constituées.


On parlera de religions « révélées », à partir du moment ou un (ou plusieurs) fondateur(s) ou prophète(s) peuvent être identifiés et se présenter comme inspirés par la divinité.

Parmi les religions révélées, on distingue les religions monothéistes dites « du Livre » (hébraïque, chrétiennes, islamiques).

Les religions « révélées » s’opposent aux religions polythéistes et panthéistes.


Ces différences ne sont pas simplement liées aux pratiques que recouvrent ces terminologies ; elles se traduisent dans la vie de tous les jours par un poids plus ou moins grand du sacré sur le profane. Il peut être dressée une histoire des religions, et une évolution des religions peut être établie, par étude, au cours du temps, de la variation doctrinale d’une part et par celle de l’influence (et des échanges en découlant), entre les différentes religions d’autre part.


Vient se greffer, très tôt, sur cette approche la notion de « droit divin » et des rapports entre églises et états, entre églises et argent; l’histoire montre une ambivalence et une confusion variable entre pouvoir spirituel et temporel (voir César Auguste, Constantin, Charlemagne, Louis XIV, Napoléon I°,….., et… la loi Combe de 1905, sous la III° République).

3 – Réflexions et maximes préliminaires :


Quelques citations, bien trop restreintes et sélectives, mais à mon sens essentielles; permettent de donner un aperçu de l’importance du fait spirituel (et pas uniquement religieux) pour l’homme, qu’il soit athée, agnostique ou croyant :


« Le XXI°siècle sera spirituel, ou ne sera pas » André Malraux;

« Les hommes ne sont que des animaux dénaturés » Vercors;

« La beauté sauvera le monde » Père Dominique Bro (OP);

« Tout ce qui monte converge » Père Pierre Teilhard de Chardin (SJ);

« Je crois que l’humanité a besoin de retourner au panthéisme. Il nous faut retrouver le respect et la considération que nous avions originellement envers la dignité du monde naturel et non seulement humain. Nous avons besoin pour nous y aider d’une religion vraie. » Arnold Toynbee;

« Tout permet de prédire …la réapparition de l’esprit dionysiaque dans notre monde contemporain » Friedrich Nietzche;

« Aime, et fais ce que tu veux » Saint Augustin;

« Gnôthi seauton = Connais-toi toi-même » gravée au fronton du Temple d’Apollon de Delphes, devise adoptée par Socrate;

« Tat Vam Asi = Et toi aussi tu Es Cela » Ganapati Upanishad.


A travers les textes et les transmissions orales religieuses on distingue fréquemment un affrontement dialectique entre une divinité maître(sse) d’amour et une divinité maître(sse) dur(e).


Ceci, et la constante du fait « religieux » dans l’humanité, au – delà des différentes expressions de celui-ci, amène à se poser la question : existe t il une « tradition primordiale », un fonds commun, une mémoire collective de l’humanité ; à rapprocher de la notion d’inconscient collectif et d’archétype selon CG Jung ?

Dans ce cas, où et quand la rechercher ? C’est ce que je vais tenter de faire à travers une approche historique du fait religieux.

Mais, auparavant, il faut citer Alain Danièlou:


«  Les sources religieuses de l’Europe sont les mêmes que celles de l’Inde, simplement nous en avions perdu la trace, à une époque somme toute récente, …. Le retour aux sources n’est pas une aventure exotique … Il s’agit de la redécouverte d’un savoir qui avait été commun à l’Inde et aux Pays Méditerranéens, avant le désastre causé par les invasions nordiques, et il est tout naturel de se tourner vers l’Inde qui, seule, a su conserver intégralement ou presque cet héritage commun qui est à la base de nos civilisations depuis le sixième millénaire avant notre ère et qui nous vient du Shivaïsme et de ses survivances dionysiaques ; et c’est dans le Shivaïsme que nous retrouvons l’origine d’une grande partie des rites, des mythes et des symboles des grandes religions ultérieures ».


De cela nous voulons, sinon pour preuve, du moins pour similitudes troublantes :

Des mêmes règles d’orientation présidant à l’édification  des Temples Hindous, Egéens et Grecs, des Mégalithes, des Cathédrales d’Occident ;

Du caractère universellement sacré des Montagnes, pour l’élévation de l’esprit, en recherche d’union et de distinction de l’UN, principe universel ;

Du caractère universel des Océans et des Eaux en tant que lieux sacrés fusionnels (eaux lustrales, retour aux origines…)

Ceci implique, nous allons le voir, une unité fondamentale du monde et la recherche, dans tous les peuples de la place de l’Homme dans cette unité ; ce qui est la base de toutes les civilisations par rapport aux religions, qu’elles soient créationnistes ou non.

4 – Les origines  et la division


Des origines premières, il faut considérer l’appartenance pleine des hommes à la Nature vraisemblablement sans différenciation, jusqu’au Paléolithique Supérieur.


Une coupure va intervenir à partir de la fin du nomadisme général et de la « fixation », de la sédentarisation d’une partie de l’humanité, sur un territoire ; d’abord vaste, avec des parcours (élevage et pastoralisme), puis de plus en plus limité (agriculture).

Cette coupure apparaît au Moyen – Orient, pour la première fois dans l’histoire humaine, au Néolithique il y a, environ, 12 à 10 000 ans.


Deux familles de religions vont dès lors diverger ; opposées et même contradictoires (avec parfois expression de contradictions « internes » au sein d’une même religion).


La souche commune, issue du Paléolithique ancien, se retrouverait, dans ses descendants, les Proto – Australoides ou « Adivâsi=premiers hommes » selon le Rig Veda ; occupants « primitifs » de la planète ; qu’on retrouverait actuellement avec Pygmées, Boschimans, Aborigènes.

Animistes, ils vénèrent les esprits de la Nature et intercèdent par les chamanes .

Langues : Munda, Swahili, Moï, Khmer.


Au début du Néolithique se différencient les Dravidiens; de l’Inde à la Méditerranée, desquels descendraient ou s’apparenteraient les Géorgiens, les Basques, les Guanches, les Etrusques, les Pelasges, les Egéens, les Egyptiens, les Peuhls.

On peut les qualifier de Shivaites (Puranas, Dasya, Pani), à familles de langues agglutinantes ; constructeurs de Mégalithes ( du V°Millénaire jusqu’au 3°Siècle Av JC).

Leurs cultures culminent avec la floraison de l’Egypte ancienne et de l’Indus ( Pakistan actuel) notamment civilisation de Mohenjo Daro et de Harappa (3800 à 1800 Av. JC).

Leurs divinités, outre Shiva (Ithyphallique, en posture de yoga) ; ont des représentations animales (vache, taureau, serpent,…) et féminines (Déesses Mères, Déesses des Montagnes) ; elles restent proches de la Nature.


Plus tard apparaissent les Aryens, dont l’origine semble située dans la Russie actuelle.

Ils vont par invasions et génocides, supplanter les précédents habitants de la Grèce (2300 à 1900 Av JC ; destruction de Troie); ils procèdent à la conquête de l’Inde (1800 – 1400 Av JC ; guerre du Mahabarata) ; de la Mésopotamie (vers 1200 Av JC) et de l’Italie (entre 1000 et 753 Av JC), avec arrivée des Latins exterminant les Etrusques, puis les Peslages, conquérants du Latium, « assimilant » les Albins et fondant Rome.

Langues : Hindi, Latines ( Latin, d’ou dérivent: catalan, provençal, français, italien, espagnol…), Nordiques (allemand,anglais, néerlandais, suédois, norvégien).

Tendance monothéiste (Bhrama, vs Dieu principal), rituels (Védas) ; toutefois si les phénomènes naturels, (foudre, feu, vent…) et si les vertus (honneur, partage, solidarité) sont personnifiés, c’est par rapport à l’homme et pour son service.


Nous pouvons dresser la liste binaire (très constratée….) suivant, montrant les principaux points d’opposition entre ces deux « familles » :

Religions DYONISIAQUES / Religions ANTI -DYONISIAQUES

Intégrations, Echanges/Conflits, Rejets

SHIVAISME Dravidiens /VEDISME (Vedas) Aryens, Latins

DYONISISME Grecs /JUDAISME (Thora) Hébreux

Oralité / Ecriture

Monde de la Nature / Monde de l’Organisation, de la Cité

Ruraux / Urbains

POLYTHEISME/MONOTHEISME

Divinité(s) diffuses, non hiérarchisées/ Divinité unique, ou hiérarchisées

Hommes intégrés au monde Naturel / Hommes élus, séparés du monde Naturel

Monde lui même sacré/Monde lui même démoniaque

Shiva, Patron des humbles, marginaux/Bhrama, Jupiter, Patrons des puissants

Dharma (Loi Naturelle) / Loi Imposée, édictée, « Livre »

Se conformer à ce que l’on est / Se plier à la Loi divine

Participer activement à l’Esprit Divin/Observance de l’Ordre Divin

Bacchantes, Mystes, Bhaktas../ « Clergé », Prêtres, Sacrificateurs…

Dieux Végétaux (arbres sacrés) et Animaux (taureau sacré,…)/ Dieux invoqués pour les besoins et ambitions des humains

Pas de propriété, partage collectif / Propriété individuelle

« Fantaisie »/ « Raison »

Pacifistes / Guerriers

Abel (éleveur, nomade)/Caïn (constructeur de villes)*

Résistants /Conquérants

Tolérants / Intégristes

Laxistes / Rigoristes

Amoralistes / Moralistes

Pureté / Pêché

Féminisme / Machisme

Matriarcat / Patriarcat

* Génèse (4, 7-17)


Le schéma présenté ici, volontairement simplificateur, n’est cependant pas aussi tranché!


Il y a eu des « contaminations » dans un sens et dans l’autre.


Ainsi, dans le Christianisme , il y a eu intégration (ou non) de Marie comme figure féminine d’intercession, mais provoquant des « schismes » quand à la définition de son statut ( Catholicisme/ Orthodoxie/ Protestantisme ).


Par ailleurs, il y a dans la religion hébraïque , diverses « variations » et écoles.

Il y a eu (voir la Bible) divers épisodes de retour au culte des idoles (et au polythéisme hébreu primitif) condamnés par le rabinat et les prophètes; et des divisions.


D’une de ces divisions…. le Christianisme est issu; Jésus était juif et pratiquait. Il y a eu pendant plusieurs siècles fréquentation commune des synagogues par juifs et premiers chrétiens-….


Enfin, il faut souligner, dans les religions anti – dionysiaques, l’existence fréquente et plus ou moins tolérée et conflictuelle de pratiques ésotériques cachées  (« mystères », « initiations »..) tendant à réintroduire une recherche de rapport actif avec la divinité:

Mystères chez les Latins ;

Kabbale chez les Hébreux ;

Soufisme chez les Musulmans ;

Gnose et Mysticisme chez les Chrétiens…


Mais ces pratiques ésotériques ont été toujours regardés avec la plus grande méfiance par le clergé exotérique, gardien des rites « public » pour la masse des fidèles « assujettis ». Le plus souvent, elles ont même été condamnées et leurs fidèles pourchassés ( « hérésies » ).

5 – La constitution des quatre religions primordiales (Proto-Religions)  dans l’espace indo – européen : 


Si nous considérons à part les religions dites « révélées ou « du Livre »; en les situant dans un espace évolutif plus tardif et se détachant des religions « pemières »; on peut mettre en avant quatre rameaux évolutifs principaux.


5-1- L’Animisme (Chamanisme) :


Nous l’avons vu, c’est la religion des origines (et jusqu’au Paléolithique Supérieur) des « Adivasi », de dialectes Munda.


Les opérations rituelles y sont « magiques », et honorent les « esprits » : des éléments (eaux, feu, air, terre), des végétaux (forêts) et des animaux.


Les « prélèvements » pratiqués par l’Homme sur la Nature doivent se faire selon des rites propitiatoires, à l’observation desquels veille le « sorcier » ou « chaman ». On s’excuse auprès de l’esprit concerné avant de mettre en œuvre le prélèvement (par exemple auprès de l’esprit de l’arbre avant de le couper).
Pour la subsistance individuelle ou de groupe ; on n’amasse pas, on ne cultive pas ; il s’agit de chasse, pêche et cueillette.

Il n’y a pas de propriété, les groupes nomadisent suivant les saisons, de campement en campement, et sur des distances variables mais pouvant représenter plusieurs dizaines de kilomètres.
Un culte particulier est accordé au Dieu – Enfant ( décliné, suivant les régions concernées ; par exemple le Murugan dravidien, le Kumara ou Skanda indien, le Kouros grec (et crétois archaïque).

Les symboles religieux les plus fréquents sont l’épieu, le bélier, le coq.


La légende du Dieu Enfant est résurgente dans le « Livre de la Jungle » avec la figure de Mowgli, empruntée à la tradition indienne par Rudyard Kipling.

D’une certaine manière on peut en retrouver la trace dans le « Petit Prince » d’Antoine de Saint Exupéry.


5-2- Le Shivaïsme :


Dans un contexte d’ensemble « magique » de vénération des « esprits » , comparable à ce qui vient d’être évoqué rapidement au paragraphe précédent; apparaît au Néolithique (avec l’élevage), un culte particulier.

On peut le qualifier de proto – shivaïte .


Il s’agit du culte du couple divin : Pâshupati et Pârvati .


Pâshupati ( le Seigneur des Animaux, ou Maître du Bétail), ou « l’Endormi », contrôle le troupeau des vivants et Pârvati : la Fille de la Montagne, ou éther personnifié, ou fille de la montagne polaire, d’Himavat (i.e. Himalaya) ; anime l’axe du monde.

De Pârvati jaillit l’Energie terrestre qui fait mouvoir et éveille Pâshupati .

Les symboles de culte essentiels sont : le taureau, le lion, le tigre et le serpent.


C’est la fusion de ce culte et de celui du Dieu – Enfant (Kumara /Murugan) qui va générer le Shivaïsme.

Pâshupati devient Shiva (dieu cornu, phallus dressé, chevauchant le taureau sacré, le cou entouré du serpent naja, drapé dans sa peau de léopard et tenant le trident – maillet) et Kumâra le fils de Shiva.


Ce schéma se retrouve, en Crète et en Grèce avec le Kouros qui devient Dyonisos (l’enfant divin, Dieu de Nisa près Peshawar) et Pashupati y est identifiable à Zän ou Zagreus puis Zeus . Il en est de même pour Bel ou Baal (dieu taureau) à Sumer .


De même, Parvati s’identifie chez les sumériens à Nin har sag (« Dame de la Montagne »), en Crète à Rhéa (Reine des montagnes) , en Grèce à Cybèle (Mère des Monts) et aussi à Diktynna (Déesse de la Montagne, Celle du Mt Dikté, Gardienne des Initiés).


Le dieu et la déesse( grecs, sumériens et indiens) ont en effet de multiples noms, déclinés en raison de leurs multiples fonctions.


Nous retrouvons cela dans le monde celtique ou la déesse se décline aussi comme : vierge, mère, énergie, bienveillante, terrible,…

Ainsi :

Macha (déesse de la fertilité);

Birgitt (déesse de l’abondance et du mariage);

Anu puis Ann a (Déesse Mère, qui donnera plus tard…la Ste Anne chrétienne…) en Irlande…..


Le Shivaïsme indo – européen primitif est donc enraciné dans le Paléolithique et codifié dès le Néolithique et, au 6° Millénaire av JC, avec:


trois sections doctrinales :

Yoga = (« joug ») Corpus de pratiques y compris exercices corporels,

Sankhya = Cosmologie,

Tantra = Enseignements ésotériques (initiatiques et magiques);

et deux sections profanes :

Puranas = Anciennes chroniques et histoire,

Agamas = Traditions (et règles de conduite).


Il s’incorporera plus tard à l’ Hindouisme par syncrétisme (à travers le Védisme et le Brahmanisme ), certains enseignements, écrits ou non, étant réincorporés dans les Véda .


Il connaîtra un renouveau, au VIII° siècle ap JC, avec Shankaracharya.


5-3- Le Jaïnisme et le Bouddhisme :


Le Jaïnisme est fondé par Jina (« le Vainqueur »), surnom de Vidharmana, qui organise vers 427 av JC, la religion jaïniste en Inde.

Il y a, concernant le Jaïnisme, une incertitude.

Jina se réclame d’une longue chaîne, puisqu’il se proclame le 24° et dernier « Tirtankara » ou « frayeur de voie » .

Ceci, qui n’est pas historiquement avéré, conférerait au Jaïnisme une antériorité au Védisme, situant son émergence aux alentours de –2500 Av JC ?

Ce fait est contesté ce qui explique que certains auteurs, en Histoire des Religions, estiment que le Jaïnisme est beaucoup plus récent , contemporain et postérieur même au Bouddhisme.

Le Jaïnisme existe encore, avec environ 2 Millions de pratiquants ; il est surtout représenté en Inde du Nord.


C’est, pourrait – on dire, une religion puritaine agnostique, quasiment athée. Ses adeptes professent leur croyance en la transmigration et au cycle perpétuel des renaissances dans un monde incréé. Son « clergé » est constitué d’ascètes missionnaires itinérants, pratiquant la nudité totale, le végétalisme strict et la protection de la vie.

Par bien des cotés, et avec certains aspects des rites, on peut penser à une contamination, ou à l’adoption, par (et de) croyances dionysiaques ( orphisme, shivaïsme ).

Il en sera de même, plus tard, en ce qui concerne l’hindouisme .


Le Jaïnisme est donc considéré, par certains, comme la souche possible du Bouddhisme  ; sa racine originelle.


Celui – ci, on le sait, se développe vers – 600 Av JC avec les enseignements de Siddharta Gautama,Cakyamuni, le Bouddha.

Il sera florissant, se développant d’abord en Inde (d’où il disparaîtra quasiment) ; en Chine et en Extrême – Orient, ainsi qu’au Tibet.

Dans chacune de ces régions du monde, il prendra divers aspects, en fonction du contexte philosophique et religieux, plus au moins teinté de chamanisme au Tibet Bön , Bouddhisme tibétain (Vajrayana) ; mêlé de Taoïsme et Confucianisme en Chine et de Shintoisme au Japon avec un fond animiste et de culte des ancêtres ….


Le Bouddhisme ne se réclame d’ailleurs pas du domaine religieux et ses portes paroles revendiquent plus volontiers une appartenance au champ de la philosophie. Il y a cependant divers aspects « rituels » et organisationnels (moines, nonnes, « hiérarchisations »,…) relevants du domaine dit « religieux ».


Il s’agit, en tous cas, d’une implication de type personnaliste dans une « réalisation » de l’état de Bouddha et visant à « sortir », se libérer, du cycle des renaissances (le « Samsara », ou monde des illusions, dans lequel nous vivons) par l’atteinte, à travers le Nirvana et le Samsara, de l’état de Bouddha.


5-4- Le Védisme , l’Hindouisme et le Brahmanisme :


Le Védisme repose sur des textes sacrés, rédigés à partir de 1800 Av JC, en quatre livres, écrits en sanskrit ( Védas ), et réputés appartenir à la révélation du Dieu Brâhmâ.


Ils comportent des rituels, prière, hymnes et formules, en particulier pour le culte le plus connu, celui du feu sacré ( Agni ).


Le Védisme , uni au Shivaïsme , s’exprimera en l’Hindouisme , attesté vers –600 Av JC.


Le Brahman (Atman), l’immensité, étant le substrat universel ; la possibilité de la manifestation consiste en un jeu de deux tendances potentielles opposées :

Vishnou (cohésion, conservatisme) et

Shiva (dispersion, destruction, changement) ;

leur résultante étant le principe de l’Espace-Temps, l’Etre Immense, Incarné: Brâhmâ.


Si Brahma appartient à ce monde terrestre, de l’éveil, du jour, de la science et du matériel;

Vishnou , dieu primordial des Aryens appartient à celui du rêve et,

Shiva est intégré par eux et identifié à celui du sommeil profond.


Ils forment dès lors une triade, mais ne sont pas « actifs » par eux mêmes, et ont leurs parèdres déclinées en déesses féminines , faisant fonction d’énergies activatrices dans l’expression d’innombrables facettes ou composantes partielles des dieux védiques, citons:

Ishvara ( Pouvoir de leur forme combinée) ;

Bhagavati ( Toute Puissante),

Devî (Resplendissante) ;

Maya (l’illusion) ;

Prakriti (la Nature manifestée) ;

Kundalini (la Déesse Première, l’Enroulée) et aussi, bien sûr:

Parvati (Déesse de la Montagne).


Ainsi la Déesse, comme Energie communiquée aux Dieux, est la source de toute manifestation….; ce qui différencie notablement ce groupe des précédents; tout en le rapprochant mutatis-mutandis du culte premier des « déesses mères » ….


6 – Conclusion :


Il y a un fond religieux commun et propre à l’humanité.


Nous l’avons suivi dans le monde Africain, Européen et Indien ou la première évolution, à partir du berceau africain de l’humanité est actuellement située.


Il est d’abord, dès le Paléolithique, à peu près sûrement uniquement de type chamanique, dans des polythéismes liés au nomadisme (chasseurs cueilleurs itinérants et « éleveurs » nomadisants) et qui perdurent encore.


Lors de la révolution Néolithique, au Moyen Orient, et avec la sédentarisation et l’apparition de l’agriculture, s’en dégagent des expressions monothéistes; liées à la « propriété »…..


Dès lors, il y a deux grands rameaux « religieux » que l’on peut schématiquement identifier.

Le rameau des religions « dionysiaques » proches de la nature et de l’animisme.


Le rameau « anti- dionysiaques » au sein duquel vont se définir et se différencier les religions révélées dites « du Livre » .


Le fait religieux est un fait culturel, il est historiquement marqué et suit l’évolution de l’humanité.


C’est donc un fait relevant de l’ordre du vivant et toujours susceptible d’évolution.


Sources principales utilisées

Danièlou Alain:  » Le polythéisme hindou  » Buchet-Chastel Ed. 1975

Danièlou Alain:  » Shiva et Dyonisos  » Arthème Fayard Ed.1979

Rey Alain (sous la dir. de): « Dictionnaire Historique de la Langue Française » Dictionnaires LE ROBERT Ed Paris 1992

Autres Sources consultées

Borgeaud Philippe: « Aux origines de l’Histoire des Religions » 2004

Eliade Mircea et Pettazoni Rafaelle: « L’histoire des religions a t elle un sens? » Cerf Ed. 1994

Fonville J. M. (de) : « Les Religions » Hachette Ed. 1992

Ries Julien: « L’homme religieux » Cerf Ed. 2001

et aussi les ouvrages de:

Frazier James, Jung Karl Gustav, Lévi-Strauss Claude, Reinach Salomon

Sites Web

jenzin.fr/ecorevo/philo/pretajen/religion.htm

Wikipedia:

www.fr.wikipedia.org/wiki/

www.rigpawiki.org/index.php?

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