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La Réincarnation dans le bouddhisme

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La Réincarnation dans le bouddhisme

Gendhun Choekyi Nyima, XIe Panchen Lama, est considéré par les bouddhistes tibétains comme la réincarnation du Xe Panchen Lama.

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La réincarnation est une des caractéristiques les plus connues des thèmes du bouddhisme. Il faut cependant remarquer que le bouddhisme ne croit pas en l’existence d’une « âme » mais d’un esprit ou « mental-cœur » (citta) ; plus précisément c’est au concept hindouiste d’atman, le Soi, que le bouddhisme oppose l’idée d’anatta, le non-soi, l’impersonnalité dont il fait une caractéristique de toute chose : il n’y a pas de soi qui se réincarne mais « chaque chose est sans soi ».

La pensée du plus grand nombre – qu’il s’agisse d’Occidentaux ou d’Orientaux – consiste à croire que la personnalité, le moi et ses agrégats se réincarnent. Ainsi, il est possible de dire ou de croire qu’on était dans une vie passée, un pharaon ou une prostituée, etc. Ainsi on explique certaines impressions de « déjà vu », certaines épreuves de la vie ou… le coup de foudre !

Mais le bouddhisme propose, à la place d’une âme et d’un corps, la distinction de cinq agrégats d’attachement, skandha. Agrégat décrit l’individu comme un ensemble de phénomènes différents ; attachement insiste sur le fait que ces constituants sont pris pour un être, pour un moi, et conduisent à s’attacher à cette idée d’égo, là où il n’y a que phénomènes éphémères, impersonnels et insatisfaisants : ce sont les trois caractéristiques de tout phénomène conditionné.

Bien que l’expression « réincarnation » puisse figurer dans quelques traductions, le terme le plus employé est celui de « renaissance ». Il y a bien, en effet, une continuité – la mort ne signifie pas que le conditionnement cesse. Le samsâra forme ainsi un cycle de vies qui s’enchaînent les unes après les autres selon la loi de causalité. La souffrance ainsi se perpétue de vie en vie ; mais selon Buddhaghosa, chaque vie ne dure, en réalité, qu’un seul instant.

S’il y a donc continuité, cette dernière est interprétée différemment par les différentes écoles bouddhiques. S’il n’y a pas d’âme, où est la continuité ? Cette question de l’interprétation se manifeste clairement dans l’étude qui est faite de la coproduction conditionnée. Cet enseignement propose de détailler les différents phénomènes qui sont dépendants les uns des autres et qui font que la souffrance se perpétue de vie en vie. Le karma est responsable de cette perpétuation.

Selon Ajahn Brahm, l’analogie qui permet le mieux d’expliquer qu’il puisse y avoir renaissance sans qu’il y ait pour autant une âme qui perdure est celle, classique, de la mangue : un noyau de mangue donnera naissance à un nouveau manguier qui manifestera de nouveau les caractères de la mangue d’origine, sans que pour autant un seul atome de cette mangue ait été transmis. Le karma est donc comparable au code génétique : c’est une information qui est transmise, ce n’est pas une entité durable qui transmigre de corps en corps.

Selon certaines écoles, la renaissance est immédiate : au moment du décès correspond la conscience de mourir et succède alors une conscience de renaître. Pour le bouddhisme tibétain, la mort implique des stades intermédiaires, les bardo.

Pour le bouddhisme chinois, tel que décrit dans le roman ésotérique et picaresque « Le Voyage en Occident » (Pérégrinations vers l’Ouest) de Wu Cheng’en, l’ici-bas comme l’au-delà constituent deux formes d’illusion, d’irréalité, et même si cette vision de la réalité reste irréelle, elle aussi, c’est la seule base d’expérience que nous avons.

Cette question de deux réalités est exemplaire des différentes approches philosophiques dans le bouddhisme ; si toutes ses branches distinguent une réalité purement conventionnelle et une réalité ultime, paramartha, l’analyse qui en est faite varie singulièrement.

Serge-Christophe Kolm dans son livre Le Bonheur-liberté (PUF, 1982) distingue le niveau de croyance populaire dans lequel la réincarnation est tenue pour une réalité du monde physique, alors que les niveaux plus élevés du bouddhisme, le bouddhisme profond (pour autant qu’il n’y ait qu’un seul et unique bouddhisme profond commun à tous les bouddhistes « cultivés »), donne à ce concept seulement un sens de parabole, une façon imagée et simplifiée de définir un concept trop complexe pour être délivré aux fidèles inaptes à le comprendre. La réincarnation ne doit donc plus être considérée comme une réalité objective mais comme une transcendance spirituelle.

Quant à celui qui ne croit pas en la réincarnation, le kālāma sutta lui enseigne quatre consolations, dont voici la seconde :

  • «Supposons qu’il n’y ait aucun au-delà et qu’il n’y ait aucun fruit, résultat, des actions faites, bonnes ou mauvaises. Pourtant, en ce monde, ici et maintenant, libre de haine, libre de méchanceté, sain et sauf, et heureux, je me maintiens».

Quelle que soit l’interprétation de la « renaissance », le bouddhisme ne l’enseigne que dans un but, et l’enseignement n’a de sens que dans l’objectif de mettre un terme à la souffrance. Gautama Bouddha n’enseigna pas seulement l’insatisfaction, mais quatre nobles vérités, présentant l’origine de l’insatisfaction, sa cessation et la voie y menant.

La renaissance en tant qu’être humain (« précieuse » selon les textes, car à la fois peu probable et seule capable de mener à l’Inconditionné) se présente alors comme une belle opportunité de sortir du cycle des existences, là où les basses existences ne le permettent pas et où les dieux ne sont pas conscients de la souffrance.

Ces dernières remarques ne doivent pas masquer la divergence de points de vue entre écoles bouddhistes : si mettre un terme à la souffrance est opinion consensuelle, quelle voie faut-il privilégier ? Le courant du Bouddhisme hīnayāna privilégie l’éveil personnel, l’être devenant ainsi un Arhat et quitte le samsara pour atteindre le Nirvana, alors que les écoles Mahayana favorisent l’éveil altruiste de Bodhisattva, ce dernier restant volontairement dans le Samsara pour aider les autres à s’éveiller. Le disciple renonce donc de lui-même à l’état de Bouddha, car il sait qu’en pénètrant dans le Nirvana il quitte le cycle des renaissances dans le Samsara pour jouir de la juste rétribution que lui vaut son ascèse et ses actes.

La renaissance n’est pas un « article de foi » du bouddhisme (même si une méthode est indiquée dans les textes pour voir ses existences passées, par projection de l’esprit dans le quatrième dhyāna). A la différence des concepts essentiels d’Absolu (nirvāna) et d’anātman, qui sont caractéristiques du bouddhisme, le thème de la renaissance ou de la vie future peut être ignoré (ce que fait le Zen par exemple, qui se préoccupe avant tout de l’« ici et maintenant »), même s’il ne fait pas de doute pour les méditants avancés.


Wikipédia

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