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Les Enseignements de Gatsal — Dépasser les préjugés et l’égocentrisme 2/2

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Les Enseignements de Gatsal

20ème édition

Lettre d’informations du monastère Dongyu Gatsal Ling Décembre 2007

Dépasser les préjugés et l’égocentrisme

(2ème partie)


Un esprit qui est obsédé par lui-même,

qui est contrôlé par l’ego,

est un esprit rigide, prompt à la critique et encombré de préjugés…

un esprit réellement éclairé resterait serein, sans préférence ni aversion.


Sa Sainteté le Dalaï Lama rencontre des gens tous les jours : des tibétains fraîchement arrivés en Inde qui viennent lui raconter les histoires atroces de leurs souffrances ainsi celles de leurs familles et de leurs communautés. Jour après jour, il doit écouter ces récits. Il est le chef du Tibet mais il est impuissant, imaginez alors la peine qu’il ressent. En plus, depuis qu’il est considéré comme une personne emblématique de la paix, il est en contact avec d’autres organisations humanitaires et d’autres communautés dans de nombreux pays. Chaque jour, il entend des histoires poignantes du monde entier. Sa Sainteté est continuellement assiégée par des gens venus non seulement du Tibet, mais aussi d’Inde et du monde entier ; beaucoup d’entre eux viennent pleurer sur son épaule, du coup, il est toujours interpellé par les problèmes des autres. Mais est-il pour autant malheureux ? Si on lui raconte quelque chose de triste, il pleure parce qu’il est réellement touché par ce qu’on vient de dire. Mais la minute suivante, il rit de nouveau ! Regardez ses yeux : ils pétillent. Sur la plupart des photos du Dalaï Lama, il sourit.

Un esprit qui est obsédé par lui-même, qui est contrôlé par l’ego – ce qu’il aime, ce qu’il n’aime pas, ses croyances, ses penchants et ses idées sur ce que les choses ou les gens devraient ou ne devraient pas être – est un esprit rigide, prompt à la critique et encombré de préjugés. Nous avons tous un tel esprit ! Nous absorbons les préjugés avec le lait de nos mères. Même ceux qui se sont mis à l’écart de notre société ont de forts préjugés. En fait, ils sont souvent les plus rigides de tous ! Les gens qui vivent dans les sociétés alternatives ont aussi leurs propres croyances, leurs idées, leurs jugements et leurs normes ! Ils ne sont pas libres.

Tenzin Palmo
Tenzin Palmo
Notre esprit est extrêmement conditionné. D’une certaine manière, tant que nous ne sommes pas complètement éclairés, nous ne pouvons avoir qu’un esprit conditionné parce que c’est là notre façon habituelle de penser. Mais nous devrions être conscients que nous avons énormément de préjugés, de jugements sur tout et sur rien. Chacun(e) a ses opinions. On pense : « c’est mon opinion » mais généralement ce n’est pas le cas. Soit c’est l’opinion générale des médias ou d’une émission que nous avons vue à la télévision la veille et qui a été réalisée avec soin pour nous convaincre du bien-fondé de ce point de vue ; soit c’est l’avis du groupe de personnes que nous fréquentons. Malgré tout, nous acceptons cette opinion comme étant la nôtre. Nous y tenons fermement et nous pensons qu’il s‘agit de la vérité et que tout le reste est faux. Puis, quelques années plus tard, l’opinion générale change, et tout le monde va dans une autre direction. C’est très intéressant à voir. Quand on avance en âge, on peut constater que c’est ce qui se passe.

Lorsqu’on est jeune, on imagine que ce que l’on pense est la seule vérité et que quiconque pense différemment est fou. La mode actuelle devient la vérité suprême et définitive, et tout ce qui s’est passé avant est démodé et stupide. Puis, peu de temps après, tout change à nouveau et le style que nous avions est démodé. Vous les jeunes, attendez donc un peu ! Votre façon de vous habiller maintenant vous fera éclater de rire dans dix ans! Lorsque, plus tard, vous regarderez des photos de vous, vous penserez, « Est-ce que je me suis vraiment habillé(e) comme ça quand j’avais cet âge ? Mon Dieu ! ». Mais à cette époque-là, c’était le top du top !

Nous sommes toutes et tous encombrés de préjugés, de partis pris, rempli(e)s d’opinions et de jugements, qui sont, en général, non vérifiés et qui nous viennent, en général, soit de notre famille et de notre milieu social, soit des livres que nous avons lus ou des émissions que nous avons regardées.

Nous examinons très peu nos d’opinions à la lumière de la raison et de la compréhension. Mais quand nous tenons à une idée, nous sommes prêts à mourir pour elle ! Des gens meurent pour leurs idées à tout moment et pas parce que ces idées sont particulièrement brillantes. Au contraire, elles sont souvent stupides ! Ces opinions, ces croyances et ces tendances à juger colorent tout que nous voyons. Elles sont loin d’être anodines et inoffensives.”

Certaines opinions sont inoffensives : par exemple, mettre ou non du sucre dans son thé, manger ou non uniquement des céréales ou des fruits. Ces opinions peuvent affecter notre corps mais elles sont, pour l’essentiel, inoffensives. Toutefois, il y a des préjugés qui sont très nocifs pour notre esprit et pour la société, les plus évidents d’entre eux sont les préjugés religieux et raciaux. Ils ont causé tant de mal dans notre monde. Des millions de gens sont tués pour la seule raison qu’ils ne partagent pas nos croyances ou parce qu’ils sont d’une autre race. Ce ne sont pas des personnes foncièrement mauvaises, mais « Si vous ne croyez pas à ce que je crois, alors vous méritez de mourir».

Elles sont loin d’être anodines et inoffensives.”. En fait, nous n’analysons pas du tout la plupart de nos propres croyances et préjugés. D’ou viennent-ils ? Les avons-nous réellement étudiés ? Avons-nous discuté, en toute intelligence, avec des personnes qui ont des opinions différentes des nôtres ? Avons-nous lu des livres sur d’autres façons de penser ? Le plus souvent, on ne lit que les livres qui renforcent nos croyances. On ne s’intéresse pas aux livres ou aux émissions qui expriment un point de vue différent. Si on entend quelqu’un dire une chose avec laquelle nous ne sommes pas d’accord, on le regarde d’un oeil encombré de préjugés. Il est très intéressant d’observer cet esprit de parti pris parce que nous filtrons tout le temps nos expériences, et que, par ailleurs, cela nous éloigne de la réalité de ce qui se passe autour de nous.

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Nous devons incarner une manière de vivre

qui nous montre le chemin du retour à la maison,

du retour à notre vraie identité


Alors, que devons-nous faire ? Tant que nous sommes dans un état d’aveuglement, nous ne pouvons vivre sans opinions ni sans croyances. Le fait même que je sois une moniale bouddhiste indique que j’ai des opinions et croyances ! Mais il nous faut comprendre qu’il ne s’agit que de croyances, que d’opinions. EIles n’ont pas, en elles-mêmes, de vérité absolue. Ce sont juste des jugements et des idées qui peuvent changer. Certaines idées perdurent depuis des millénaires et doivent absolument être réexaminées. Certaines qualités que nous avons toujours admirées (qu’elles soient admirables ou non) devraient être examinés d’un oeil neuf même si elles ont perduré tout ce temps.

L’important, c’est de ne pas nous identifier à nos pensées et à nos sentiments, mais de comprendre que les pensées et les opinions sont simplement des facteurs mentaux. Même un système de croyances n’est qu’un objet mental artificiel. A propos du Dharma, le Bouddha a dit : « C’est un radeau, un bâteau. Il peut vous amener de la rive de la réalité relative à la rive de la réalité absolue ». Maintenant, pendant que nous sommes au milieu du fleuve, nous serions fous d’abandonner le radeau, mais une fois que nous serons arrivés de l’autre côté du fleuve, il serait également insensé de mettre le radeau sur nos épaules et de continuer à le porter par respect. Lorsque nous avons atteint l’autre rive, nous n’avons plus besoin du radeau. Le Dharma n’est qu’un outil ; c’est le chemin, mais ce n’est pas le but.

Tous les systèmes de croyances et les religions sont tout simplement relatifs. En eux-mêmes, ils ne sont pas la vérité mais ils peuvent nous aider à comprendre la vérité. Ce serait difficile d’atteindre la réalisation spirituelle sans eux. Nous pouvons peut-être réussir à l’entrevoir, mais il est assez difficile de stabiliser cette expérience sans une espèce de discipline spirituelle. A la fin, même les opinions et les idées les plus élevées et les plus nobles doivent être laissées de côté. En attendant, nous devons comprendre que tous nos préjugés, toutes nos conceptions, tous nos penchants devraient être regardés comme de simples phénomènes éphémères. En eux-mêmes, ils n‘ont pas de validité ultime ; ce ne sont que des états mentaux et non pas « moi » ou « les miens ».

Nous pensons tous qu’un esprit véritablement éclairé ne ferait pas de distinction entre les personnes. Nous savons qu’un maître qui incarne réellement la sagesse et la compassion serait totalement ouvert et qu’il accepterait tout le monde. Comment un maître éclairé peut-il dire : « Oui, j’accepte cette personne-ci mais je n’accepte pas cette personne-là » ? Ce n’est même pas imaginable. Par conséquent, plus nous fermons notre coeur à certaines parties de la société, à certains groupes religieux, à certaines races, moins nous incarnons notre véritable nature éclairée. Plus nous nous sentons rigides et prompts à la critique, plus nous sommes pris dans nos préférences et nos aversions, plus nous sommes loin d’un état éclairé, parce que l’état éclairé n’opère aucune distinction entre les personnes.

Revenons une fois encore sur cette question de l’ego. L’ego nous fait complètement perdre le nord. Dans une société comme la nôtre, à ce point fondée sur la satisfaction égoïste de nos désirs, nous sommes loin du chemin de la vérité. C’est pourquoi les gens se sentent souvent à ce point vides et perdus. Nous devons incarner une manière de vivre qui nous montre le chemin du retour à la maison, du retour à notre vraie identité, pour que nous puissions vivre selon notre véritable nature et non pas selon cet ego trompeur.

Selon le Dharma, il y a 2 moyens pour y arriver. Le premier moyen est celui de l’introspection : apprendre à calmer l’esprit, à le concentrer sur un seul point. Ensuite, nous devons examiner la nature même de l’esprit, de manière à pouvoir distinguer le vrai du faux. Ainsi, nous pouvons commencer à laisser tomber toutes nos fausses identifications, et plus particulièrement notre très forte identification à l’ego.

Dans le même temps, nous pouvons aussi commencer à nous ouvrir aux autres à travers la générosité : non pas seulement en donnant des choses matérielles, mais aussi en donnant du temps, en donnant de la compréhension, en donnant de l’air, en étant présent quand les autres ont besoin de nous. Nous cultivons petit à petit nos capacités à ne pas juger, à être ouvert(e), à être patient(e), à être compréhensif(ve), à être tolérant(e), à ne pas réagir avec colère quand les choses ne vont pas comme nous voulons ou quand les autres ne font pas ce que nous voulons. Nous apprenons peu à peu à accepter les choses, à intégrer les difficultés de la vie, en les utilisant avec habileté au lieu de réagir de manière nuisible et de nous mettre en colère. Nous développons la bonté – ce que le Dalaï Lama appelle le coeur généreux – un coeur qui se soucie des autres et non pas uniquement de lui-même.

Il y a des personnes qui sont extrêmement soucieuses des animaux sauvages, des arbres, de notre environnement. C’est fantastique. Mais quelquefois ces mêmes personnes sont grossières avec leurs parents et leur causent beaucoup de chagrins et de soucis. Nous devons commencer à l’endroit où nous sommes, et avec les personnes qui sont autour de nous ; ça commence par nos parents, nos conjoint(e)s, nos enfants et nos collègues. Rendons-les heureux ! Pratiquons la bonté, la générosité, l’amour, la tolérance envers celles et ceux qui sont autour de nous, avec qui nous travaillons, que nous rencontrons. Soyons simplement là pour eux, soyons gentil(le)s avec eux, pensons qu’eux aussi veulent être heureux. Essayons de ne causer aucune souffrance à quiconque. Essayons de rendre les autres un peu plus heureux: un sourire ou un mot gentil peuvent avoir un profond impact. Arrêtons d’être si égocentriques. Pensons aux autres. Ce que nous désirons n’a pas tant d’importance que ça.

Très souvent, pour trouver notre bonheur, nous faisons tant d’efforts pour obtenir ce que nous désirons que nous en oublions de penser à ce que les autres désirent et comment nous pouvons les rendre heureux. L’ironie, c’est que nous touchons au bonheur quand nous pensons vraiment plus aux autres qu’à nous-mêmes. Un jour, on découvre en se réveillant qu’on est heureux sans même avoir recherché son bonheur. C’est un des paradoxes de la vie : moins nous pensons à nous-mêmes, plus nous pensons aux autres et plus nous serons globalement heureux. Plus nous sommes obsédés par notre propre bonheur et plus nous nous moquons de ce que vivent les autres, plus nous nous rendons malheureux, et plus notre entourage souffre également.

Il y a tant de choses que nous pouvons faire. Tout d’abord, nous pouvons commencer par essayer de rendre heureuses les personnes qui sont autour de nous. C’est notre défi. Il est beaucoup plus facile de nous asseoir et de penser, « Que tous les êtres vivants, partout, soient en paix et heureux ! » Et lorsque nous pensons à ces chers kangourous, opossums et autres wallabies qui sautillent ici ou là, les larmes nous viennent aux yeux. Mais nous nous mettons en colère si notre mère veut que nous fassions la vaisselle juste au moment où nous nous apprêtions à sortir. Et pourtant, notre mère est un être sensible, notre conjoint(e) est un être sensible, nos enfants sont des êtres sensibles : Ce sont eux les êtres vivants, juste en face de nous. C’est à eux que nous devons souhaiter d’être en paix et d’être heureux.

Dans la tradition tibétaine, quand nous méditons sur tous les êtres vivants, nous visualisons notre père à droite, notre mère à gauche et nos ennemis devant nous. Nous plaçons en face de nous tous ceux que nous n’aimons pas, suivis par notre famille et nos amis. C’est habile parce que cela nous rappelle que ce ne sont pas uniquement les êtres vivants en général – ces petits points à l’horizon – qui sont importants, mais plutôt les personnes au côté desquelles nous vivons. Ce sont ces personnes dont nous parlons, celles avec qui nous sommes en contact et avec qui nous avons un lien karmique. Qu’on les aime ou non, ce sont des êtres sensibles qui veulent être heureux et c’est notre responsabilité de les rendre heureux.

Revenons sur le sujet par lequel nous avons débuté, à savoir le sentiment d’appartenance qui nous unit à notre famille et à notre tribu, et plus largement à notre culture. C’est très important. Il nous faut trouver un équilibre entre la complète soumission aux règles parentales et tribales et une liberté si grande que nous ne sommes plus reliés à rien. Pour atteindre cet équilibre, il y a un moyen : développer notre stabilité intérieure. A partir de là, nous pouvons commencer à rayonner vers l’extérieur, vers tous les êtres de notre entourage. Nous ne nous sentons plus isolés parce que nous savons, au plus profond de nous-mêmes, que nous sommes reliés à ces êtres. Nous ne nous inquiétons plus de ce que les autres pensent de nous ; nous nous inquiétons seulement de la manière dont nous pouvons aider les autres.

La société est devenue tellement tordue. Elle ne nous donne pas ce qu’elle a promis de nous offrir. Elle ne nous donne pas le bonheur éternel ou la joie paisible. Elle ne nous offre que des sentiments de désespoir, de séparation, de frustration ainsi qu’un désir, avide et puissant, qui ne peut jamais être comblé, nous laissant un grand vide dans le coeur. Beaucoup de gens croient que rien n’a de sens et ils perdent complètement espoir. Il y a tant de dépressions – regardez combien de personnes sont sous traitement de type Prozac. Les tibétains n’ont même jamais entendu parler d’une chose comme le Prozac.

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Nous pouvons faire tant de choses.

Tout d’abord, nous pouvons commencer par essayer

de rendre heureuses les personnes

qui sont autour de nous.

C’est notre défi.


Par conséquent, c’est à nous d’agir. Personne ne peut le faire à notre place. Chacun(e) d’entre nous est responsable de sa propre vie, c’est à nous de la stabiliser et de bien la mener. Les méthodes sont là, mais nous seul(e)s pouvons les mettre en oeuvre. Lorsque notre esprit est clair, lorsque nous regardons vraiment toute chose avec clairvoyance, alors tout se met en place. Ensuite, ce que nous devons faire apparaît comme une évidence. Mais personne ne peut le faire à notre place. C’est comme nager à contre-courant. La société suit le courant, vers l’aval, vers les marécages, vers les terres incultes du désespoir. Si nous allons dans cette direction, c’est là que nous ferons naufrage. Il nous faut donc nager à contre-courant et cela demande beaucoup d’efforts. Donc, nous allons à contresens du courant général mais, curieusement, cela ne nous égare pas.

Une fois que nous nous connectons à notre stabilité intérieure, d’une manière ou d’une autre, loin d’être déconnecté(e)s de tous les êtres autour de nous, nous nous sentons intimement et profondément relié(e)s à eux. Quand nous sommes capables de mener notre vie de manière juste, nous devenons alors capables d’aider et de guider les autres. Nous attirons les personnes qui partagent notre état d’esprit et qui commencent, elles aussi, à mettre en question les mentalités actuelles. Bientôt, nous goûterons peut-être la compagnie et l’amitié de nombreuses personnes avec qui nous serons en affinité.

Le Bouddha a énormément fait l’éloge de l’amitié. Il y a un curieux dialogue dans les Soutras où Ananda, l’assistant du Bouddha, lui dit : « Je pense que l’amitié, c’est la moitié de la voie spirituelle.» Et le Bouddha répond : « Ne dis pas ça Ananda ; l’amitié, c’est la totalité de la voie spirituelle.» La compagnie de personnes qui encouragent, qui comprennent et qui aident est très importante. Dans notre vie, au fur et à mesure que nous progressons dans cette direction spirituelle nouvelle, ces personnes viennent à nous. Elles sont attirées comme des aimants.

Questions

Q : J’ai une question concernant l’usage du mot « médias ». Vous avez généralisé en parlant des médias comme une force plutôt négative. Cependant, je me demande si ce terme général de médias ne devrait pas être remplacé par celui de « médias publicitaires » parce que les médias en eux-mêmes n’empêchent pas les gens de « nager à contre-courant » : on peut trouver des exemples où l’exposition aux médias nous permet un certain nombre de prises de conscience.

R : C’est exact, bien entendu. Par exemple, dans la presse et à la télévision, j’ai vu beaucoup de choses très belles, stimulantes et bénéfiques. Mais la tendance globale – qui représente un bon 90 à 95% des médias – est basée sur la diffusion de la mentalité consumériste. Certes, il y a des personnes pleines de bonté, responsables et dévouées qui écrivent et produisent des choses merveilleuses, mais elles ont tendance à être submergées par l’avalanche de toutes les autres choses que la majorité des gens regarde. C’est là le problème. On allume la télévision et la plupart des émissions sont des cochonneries abrutissantes Je pense qu’on s’en rend plus compte quand on a un oeil extérieur. Dans notre monastère en Inde, nous n’avons pas de télévision, je ne vais pas au cinéma, je n’écoute pas la radio et le plus souvent je ne lis même pas les journaux. Par conséquent, nous ne sommes pas noyées chaque jour par le flot médiatique. Ainsi, quand nous venons dans un tel endroit, nous portons un regard clair sur les choses. Et nous réalisons alors combien le niveau est épouvantable, et quels mensonges sont généralement propagés.

Q : Une des choses les plus difficiles dans mon travail est d’essayer de mettre au clair toutes les pensées que les personnes ont à propos de leur comportement par rapport au reste du monde, puis de remonter aux origines de ces pensées. Mais ce processus semble sans fin. Enfin, tout à coup, on arrive à une sorte de racine, et là une colère incroyable surgit : les gens résistent fortement. Ils ont l’impression que leurs problèmes, leurs idées sont bien réels et solides.

R : Je suis persuadée qu’il y a beaucoup de gens comme ça. Nous devons simplement nous connecter. Comme nous nous accrochons à nos préjugés, à nos idées et à nos opinions, nous pensons qu’ils sont « moi » et « les miens », en fait ce sont les supports de l’ego. Par conséquent, si nous enlevons les opinions et les jugements de l’ego, où est le « Je » ? Parce ce que c’est ce que je suis : je suis quelqu’un qui croit en ceci et en cela, et quand nous détruisons tout ceci et tout cela, nous n’avons plus rien pour nous soutenir. Par conséquent, il est évident que les gens défendront ces idées jusqu’à la mort. C’est pourquoi, comme je le disais, il est très important de remonter jusqu’à la racine, puis de partir de là pour essayer d’aider les gens à aller dans une autre direction.

(Voir le début de l’enseignement dans la 19ème édition)

– Tenzin Palmo

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