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Procès Douch: Justice karmique ou justice des hommes?

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04.08.2010

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Le tribunal international a rendu son verdict le 26 juillet: 30 ans de prison pour Kaing Guek Eav, plus connu sous le nom de « Douch », qui dirigeait la prison S-21 sous le régime des Khmers rouges au Cambodge entre 1975 et 1979. Environ 17 000 Cambodgiens y ont été torturés et exécutés, seulement sept d’entre eux ont survécu.

Selon certains médias, le verdict est très léger mais notons que l’aboutissement de ce procès constitue déjà une victoire en soi. Il vient en effet couronner dix ans de dialogues et d’enquêtes auprès de la population locale où règne une véritable loi du silence, empêchant tout travail de mémoire d’avoir lieu. Au Cambodge, les souvenirs des bourreaux et ceux des victimes cohabitent encore au quotidien(parfois dans la même rue ou encore dans la même famille) et la période du règne de Pol Pot demeure un sujet douloureux et interdit.

Ce procès de neuf mois constitue une avancée majeure non seulement parce que Douch est le premier haut responsable Khmer à être jugé pour ses crimes, mais aussi parce que le tribunal n’était pas uniquement constitué d’une juridiction internationale. Il s’agissait en effet d’une formation mixte dans laquelle magistrats cambodgiens et internationaux ont travaillé ensemble. C’était surtout la première fois que des victimes étaient autorisées à intervenir en tant que parties civiles et non comme simples témoins devant un tribunal international. Douch a alors du faire face à ses victimes qui réclamaient la réparation des préjudices subis.
En connaissance des difficultés rencontrées par la communauté internationale pour organiser ce procès, on ne peut que saluer tout le travail effectué : il s’agit réellement d’une étape essentielle de l’histoire cambodgienne.

Il a parfois été dit que les cambodgiens ne se sentaient pas concernés par ce procès, peut-être en raison d’une croyance en une justice karmique enseignée par le bouddhisme, notamment au niveau des réincarnations. À moins que ce silence des cambodgiens ne révèle une crainte plutôt qu’un véritable désintérêt; un tabou autour de cette période, enfin brisé par ce verdict. Si certains ont perçu ce procès comme une ingérence de l’occident dans ce pays imprégné de culture bouddhiste, il semble qu’il ait néanmoins répondu à un certain désir de justice auprès d’une partie de la population cambodgienne, malgré ce qu’ont pu dire certains analystes. Les retransmissions télévisées du procès ont connu des records d’audience et une centaine de personnes se sont constituées partie civile. Ces chiffres pourraient bien encore augmenter lors des procès à venir de quatre autres responsables khmers.

Alors qu’en pensez-vous? Quelle place pour la justice dans le bouddhisme? Comment placez-vous la justice karmique par rapport à celle des hommes?

Brice Andlauer pour Buddhachannel


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