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Thaïlande — Au chômage ? Devenez moine !

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22.10.2009

Une initiative assez originale pour combattre la crise en Thaïlande. Au-delà des mesures de relances proposées par le gouvernement démocrate, les autorités religieuses ont demandé aux monastères d’aider les chômeurs. Comment ? En les faisant moines. Pour la vie, ou pour quelques semaines, le temps de leur enseigner les vertus d’une vie simple. Lancée il y a trois mois, le programme est un vaste échec, même si les monastères restent des refuges pour les personnes déshéritées.

Prière de moines bouddhistes au temple de Yala, province de Thailande.
Prière de moines bouddhistes au temple de Yala, province de Thailande.

Cela partait pourtant d’une bonne intention, soupire le responsable de la campagne, le docteur Amnaj Buasiri.

Le secrétaire général du Conseil suprême de la Sangha, l’autorité du bouddhisme en Thaïlande, estime que proposer à des chômeurs de devenir moine accompagnait de manière idéale les mesures de relance du gouvernement : « Le gouvernement essaye de faire ce qu’il peut pour aider les gens. Mais beaucoup n’ont plus d’emplois. Qu’est-ce qu’on peut bien faire d’eux ? On s’est dit qu’ils pourraient devenir moines quelques temps car la philosophie du bouddhisme, c’est l’autosuffisance. Les chômeurs apprendraient, comme les moines, à ne manger que deux fois par jour ou à n’avoir que trois vêtements. En pratiquant la méditation, ils apprendraient à se contrôler et aussi à accepter le premier emploi, à arrêter de sélectionner».

Aider les chômeurs à vivre mieux en étant moins exigeants donc, tout en palliant, pourquoi pas, une crise des vocations. « S’ils aiment leur vie de moine, et bien on les encourage à rester. Aujourd’hui, le nombre de moine a chuté. Il est passé de 300 000 à 250 000 en 6 ans », selon Amnaj Buasiri.

Mais trois mois après le lancement de la campagne, Amnaj Buasiri doit reconnaître qu’il s’agit d’un échec. Plus préoccupés par la recherche d’un nouvel emploi que par les enseignements bouddhistes, très peu de chômeurs se sont en effet présentés aux temples.

Mais les monastères n’ont pas non plus joué le jeu. Pour le supérieur du Wat Tad Tong, l’un des plus gros établissements de Bangkok, chômeur égal délinquant, et il est trop difficile de leur faire accepter les règles de la communauté : « Peu importe qu’ils soient riches ou pauvres, ils doivent avoir des qualités spécifiques et accepter de suivre les préceptes bouddhistes avant d’être ordonnés moines ». Pour lui, le gouvernement s’est déchargé de ses responsabilités en demandant de l’aide aux monastères. Pourtant, le temple a toujours été un refuge pour les Thaïlandais déshérités.

Les chômeurs ne portent pas la robe des moines, mais ils rendent de petits services aux religieux en échange d’un lieu où dormir ou d’un repas. Aujourd’hui, ils sont beaucoup plus nombreux, explique Chuan, qui « travaille » officieusement dans ce monastère depuis bientôt 3 ans : « Les moines me donnent des pourboires quand je fais des emplettes pour eux. Vous savez, des pauvres j’en vois passer tous les jours au monastère. Mais ils demandent juste de l’argent ou du riz, ils ne veulent pas devenir moines. C’est difficile, il faut suivre toutes les règles et on n’a plus vraiment de liberté ».

Le gouvernement devra donc trouver d’autres alternatives pour aider les quelque 300 000 Thaïlandais qui ont perdu leur emploi depuis l’année dernière. Il a déjà rallongé de six à huit mois la période d’indemnisation du chômage pour les personnes récemment licenciées.


Marie Normand, correspondante à Bangkok

Source : www.rfi.fr

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