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Le Shingon, branche ésothérique du bouddhisme japonais

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Le Bouddhisme Japonais est d’une étonnante diversité. A travers les siècles, des courants se sont formés, déformés, transformés. A chaque croyance sa branche, à chaque nuance son école. Le Bouddhisme Shingon, vieux de l’époque française carolingienne, en est un exemple. Toujours présent et très pratiqué au Japon, il correspond au Bouddhisme ésotérique, un courant religieux qui trouverait son origine en Inde. Le fondateur de l’école Shingon, Kôbô-Daïshi, ainsi que ses enseignements ont participé au succès du Shingon, succès que le cours de l’histoire n’a pas altéré : aujourd’hui, on compte douze mille temples Shingon au Japon pour environ quatorze millions de pratiquants. Mais plus encore, d’innombrables statues honorent Kôbô-Daïshi, comme pour immortaliser le souvenir de ce maître dont la légende dit qu’il pouvait faire tomber la pluie grâce à ses rites.


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A l’origine, le nom « Shingon » est la traduction d’un mot d’origine sanskrite « mantra », qui signifie « parole vraie ». Ces mantras, constitués de syllabes mystiques, étaient en fait des formules prononcées par les bouddhistes. Ils étaient considérés comme des sons sacrés.

Dans l’Inde védique (de 1800 à 800 av. JC), on les répétait pour obtenir des Dieux bonheur, force ou santé… Mais pour le Bouddha historique, le Bouddha Shakyamuni, ces pratiques étaient du domaine de la magie et de la superstition. Cela n’empêcha pas certains moines de créer leur propre courant : persuadés que les mantra pouvaient permettre d’accéder à l’illumination, ils formèrent une branche ésotérique du Bouddhisme et appelèrent cette voix le Véhicule de Diamant (Vajrayana), source du Shingon. Pour eux, l’objectif de la pratique était de devenir soi-même un Bouddha.


Au centre de ce Bouddhisme ésotérique, le Bouddha Mahavairocana (en japonais Dainichi) fait figure de divinité centrale. Ce nom « Mahavairocana » signifie « Le Grand Illuminateur de tout » ; Symbole de la Vie éternelle et personnification de l’Univers, le Bouddha Mahavairocana est à la fois Tout, et partout (Le Bouddha Sakyamuni n’en est qu’une simple émanation).

Le Shingon, qui s’inspire de cette voix du Véhicule du Diamant, repose aussi sur deux textes sacrés, écrits vers le 2ème siècle en Inde : le Kongôtchô-kyô et le Daïnitchi-kyô.

Le premier présente « le monde du Diamant », c’est-à-dire la sagesse du Bouddha ; cette dernière est comparée à la dureté et à la pureté du diamant, pouvant anéantir tout désirs et illusions.

Le deuxième texte explique comment obtenir cette sagesse : par la « compassion », les mantras, les mudras (gestes des mains)… Yûkaï Senseï, moine français Shingon, raconte tout son parcours (dans un article paru à Géo), d’apprenti à moine.
« Le Hassenmai Goma est l’une des ascèses les plus difficiles qu’il m’ait jamais été donné d’accomplir. Elle consiste à faire brûler un à un, dans le foyer d’un autel huit mille morceaux de bois de la taille d’un crayon. Chacun des bâtonnets représente une passion du coeur de l’homme . »

Kobo-daïshi a dû lui aussi passer par là.


Tout a commencé pendant la période Heian, au 9ème siècle.

Retiré dans les montagnes, Kôbô-Daïshi mène alors une vie ascétique. A même pas 18 ans, la pratique de la concentration et les récitations de mantra occupent ses journées. Puis, le jeune moine décide d’aller en Chine, un voyage dont il reviendra « illuminé » : sa rencontre avec Houei-Kouo (Keika en Japonais), septième patriarche de l’école Shingon est déterminante. Très vite, il devient son disciple et s’adonne aux enseignements de ce Bouddhisme ésotérique. Et, comme s’il était prédisposé à cette religion (ce que croyait d’ailleurs son maître), il rentre au Japon considéré comme le huitième patriarche de l’école. Ramenant avec lui plus de 200 travaux, dont la majorité sont des traductions appartenant au bouddhisme ésoterique, Kôbô-Daïshi se met dès lors à transmettre son savoir.


En 816, il fonde le temple principal de la secte ; La propagation du Shingon (appelé aussi « mikkyo ») est alors très populaire auprès de la cour et de la noblesse.

Quelques années plus tard, il reçoit le temple du Tôji, à Kyoto. Aujourd’hui encore, c’est là que tous les grands maîtres du Shingon se retrouvent une fois par an pour la cérémonie du Mishuho, où ils prient «pour la sauvegarde et le bonheur du pays».

Pour eux, Kôbô-Daïshi est considéré comme l’un des plus grands personnages de son temps, ayant influencé toute la civilisation japonaise, aussi bien d’un point de vue religieux qu’artistique (calligraphie, peinture, sculpture) et scientifique.

« Le coeur des êtres est comme le bouton de lotus, le coeur du Bouddha est comme la pleine lune » dit Kôbô-Daïshi. Et c’est ce coeur qu’il faut éveiller à la compassion. Si c’était l’enseignement d’il y a des siècles, il semble que ça l’est toujours. D’après Aoki Senseï, un des plus grands maîtres Shingon (mort en 1985) :

«Nous ne vivons pas seuls, mais grâce aux autres. Notre vie est un don précieux qu’ils nous font. Aussi devons-nous cultiver un sentiment de respect et de reconnaissance non seulement vis-à-vis des personnes vivantes ou décédées à qui nous devons d’être là, mais encore pour chaque objet que nous utilisons. La vie est partout et dans chaque chose… »


Clémence de la Robertie pour www.buddhachannel.tv

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