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Suisse — Lausanne, capitale des Tibétains en exil

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06.08.2009

La patinoire de Malley a réuni plus de 13’000 personnes mercredi pour la conférence publique du dalaï-lama, couronnement de deux jours d’enseignement bouddhique. Un show bon enfant devant un public conquis, qui en est ressorti avec des étoiles plein les yeux.

13'000 personnes, dont 2000 Tibétains, sont venus écouter le dalaï-lama.
13’000 personnes, dont 2000 Tibétains, sont venus écouter le dalaï-lama.

En cette chaude journée, la foule bigarrée déferle d’un pas tranquille vers la patinoire de Lausanne, dans une ambiance de vacance. Des tentes abritent des stands de diverses cuisines et boutiques orientales ainsi qu’une vaste cantine où piquent-niquent des familles tibétaines aux vêtements chatoyants qui, négligeant tables et bancs, sont assises en cercle par terre, avec des enfants et des bébés.

On distingue les T-shirts rouges ou gris des 500 personnes de l’accueil (dont 360 bénévoles), les robes grenat et jaune des moines, tibétains ou occidentaux, des jeunes au teint sombre et aux yeux bridés cachés derrières des lunettes noires de marque, des «babas cool», quelques complets-veston, des vieux, des jeunes, des hommes, des femmes (beaucoup).

Famille tibétaine.
Famille tibétaine.

2000 Tibétains

Un quinquagénaire explique avec un fort accent vaudois: «Je ne connais pas grand-chose au bouddhisme mais ces choses, comme la réincarnation, sont dans mes pensées depuis longtemps. Je suis surtout venu pour sentir ce personnage. J’ai de la peine à concevoir qu’il soit la réincarnation du bouddha, mais ce qui me plaît chez lui, c’est qu’il dit qu’il reste un homme, quoi!»

La nouvelle génération.
La nouvelle génération.

Venus de toute l’Europe, mais aussi d’Asie ou des Etats-Unis, dont plus de 2000 Tibétains en exil, ces gens font la queue avec patience et bonne humeur pour passer les contrôles de sécurité et gagner leur place.

Méditation...
Méditation…

A l’entrée des «VIP», on ne peut que remarquer Jean-Robert Allaz, vicaire épiscopal de Lausanne, avec son costume gris et son col romain: «Je représente l’évêque du diocèse et je me réjouis d’entendre ce chef religieux, si préoccupé lui aussi de la dimension spirituelle de notre monde si matériel.»

Un temple dans une patinoire

Transformée en temple avec sa moquette rouge, ses peintures sacrées, ses statues, ses bougies, étendards et autres dorures, la patinoire se remplit dans un bourdonnement qui enfle.

Le passé et le présent...
Le passé et le présent…

Assis tout en haut sur les places les moins chères (130 francs par personne pour les deux jours), un couple espagnol d’âge mûr se tient par la main, le sourire jusqu’aux oreilles. Une jeune femme allaite son nourrisson, un ado tibétain éteint son portable, une élégante retouche son rouge à lèvres, chacun met son casque de traduction.

Des moines se mettent à chanter de leur voix monocorde, des musiciens jouent un air monotone et Sa Sainteté fait son entrée sur scène, invitant le public à prendre place. Petite séance photo, puis un silence complet s’installe, ponctué par les pleurs ou les rires des enfants.

Merci à la Suisse

L'Orient et l'Occident.
L’Orient et l’Occident.
Sans notes, «il» commence à parler, d’abord quelques mots en tibétain, puis dans un anglais un peu haché, la voix un peu fatiguée, relayé par Matthieu Ricard, son interprète officiel en français, très détendu.

Le dalaï-lama commence par rappeler que la Suisse a été le premier pays à accueillir quelque 1000 Tibétains fuyant la répression chinoise il y a quelque cinquante ans (ils sont aujourd’hui dans les 4000). Et de remercier la Confédération de son hospitalité, ainsi que de son aide aux réfugiés en Inde et au Népal, via la Croix-Rouge. Applaudissements.

Le chef spirituel se dit aussi «impressionné» par le nombre de personnes de cultures différentes venues entendre son enseignement. Il ajoute que, où qu’il aille dans le monde, il commence toujours par rappeler que les valeurs humaines priment sur toutes les autres et que chacun doit conserver ses valeurs culturelles et religieuses.

Rires et larmes

Puis il aborde le thème de la conférence à proprement parler: la paix. «La paix ne signifie pas le manque de guerre ou de violence, elle doit prévenir l’apparition de la violence, se nourrir de la confiance plutôt que de la peur. En développant compassion et altruisme, on peut atteindre cette paix intérieure qui crée la paix dans le monde.»

Le tout entrecoupé par des plaisanteries et autres taquineries. Lorsque le ventilateur fait voler les feuilles de son traducteur, il lui lance d’un ton moqueur: «A quoi ça sert de prendre des notes si le vent les emporte une par une?». Bon public, la salle s’esclaffe, comme à chaque plaisanterie qui suivra.

La sortie se fait dans le calme. Une Anglaise lance, les yeux humides: «Je suis venue exprès de Londres pour le voir et je suis très émue. Je ne peux pas vous expliquer pourquoi, mais, depuis hier, je pleure chaque fois que je le vois. C’est une sensation physique très forte et je ne m’attendais à une telle intensité de sentiments.»

100’000 francs de bénéfice

Jon Schmidt, porte-parole de la communauté Rigdzin organisatrice du séjour du dalaï-lama, est rayonnant: «On est super content et aucune incident n’est à déplorer».

Son sourire s’élargit encore lorsqu’il ajoute que, sur un budget d’un peu plus d’un million de francs, la manifestation a dégagé un bénéfice «inattendu» de 100’000 francs. Une somme dont le dalaï-lama décidera de l’utilisation, et dont «la destination sera communiquée aux organisateurs».

Aux accusations d’avoir voulu «faire consommer du bouddhisme», Jon Schmidt répond: «Il n’y a pas eu de show mais c’est vrai qu’un tel rendez-vous devient énorme à cause de l’affluence.»


Isabelle Eichenberger

Source : www.swissinfo.ch

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