16.06.2009
Une récente polémique a ravivé le débat sur l’acceptation des gays et des trans en Thaïlande. En effet, un guide de bonne conduite ainsi que des cours de comportement vont être donnés aux jeunes moines thaïs gays et trans qui auraient selon les autorités religieuses une attitude «trop extravagante». Ces cours concerneraient la façon de s’habiller ainsi que la gestuelle ou encore la façon de marcher.
L’ordination des gays et des trans est théoriquement interdite en Thaïlande. Pourtant ceux-ci représentent une part non négligeable de l’effectif des écoles missionnaires bouddhiques. La question de l’intégration des gays et des trans est donc de nouveau posée à travers cette polémique.
L’hebdomadaire Courrier International a récemment publié une interview de l’artiste thaï et américain Michael Shaowanasai, réalisateur et acteur du film The Adventures of Iron Pussy, qui relate les exploits d’un superhéros transsexuel. Il indiquait dans les colonnes du magazine que la société thaï n’était pas aussi ouverte qu’on le pensait, et qu’il était aujourd’hui plus simple d’assumer sa transsexualité en Thaïlande que d’être homosexuel.
Il y a en effet en Thaïlande de nombreuses kathoeys, des MtF (femmes devenant hommes) qui sont relativement bien acceptées. Ceci s’explique en partie par la tradition de travestissement présente dans le théâtre classique thaï avec les khon (hommes travestis en femmes) et les lakhon (femmes travesties en hommes). Les kathoeys sont présentes partout en Thaïlande, y compris dans les campagnes, et nombreuses sont celles devenues célébres comme Nong Toom qui a effectué sa transition après avoir brillé comme boxeur professionnel.
La société thaïe est relativement tolérante vis-à-vis des kathoeys. ceci s’explique par la perception qu’offre le bouddhisme sur cette question. La notion de karma est en effet très présente dans la question des kathoeys, dont l’état serait lié à des transgressions graves commises lors d’existences antérieures, d’où un appel à la tolérance et à la miséricorde plutôt qu’au blâme. Les kathhoeys font toujours néanmoins face à des difficultés d’intégration sociale, les réactions familiales sont souvent négatives et les discriminations sont nombreuses, notamment au niveau professionnel.
Selon Peter Jackson, australien et spécialiste des rapports entre sexualité et bouddhisme dans la société thaï, cette acceptation des kathoeys est relativement tardive et est liée au bouleversement engendré par l’épidémie du VIH. Celui-ci est en effet venu bouleversé la donne en plaçant non plus les kathoeys au centre des préoccupations des autorités bouddhistes concernant les minorités sexuelles, mais en ramenant les gays au cœur des préoccupations des moines bouddhistes.
Les moines thaïs sont en effet très partagées sur la question de l’homosexualité selon Jackson, avec d’un côté une partie des moines bouddhistes qui accepte celle-ci avec la même explication que les kathoeys, l’homosexualité ne serait pas contrôlée consciemment et serait liée à des transgressions dans des vies antérieures. Tandis qu’une autre partie des moines voit en l’homosexualité «une violation intentionnelle de la conduite sexuelle «naturelle» résultant d’un manque de contrôle des pulsions sexuelles».
Les déclarations de Peter Jackson et de Michael Shaowanasai semblent en tout cas confirmées par les très nombreuses discriminations dont sont encore victimes les homosexuel-le-s en Thaïlande aujourd’hui.
Thomas Prado pour www.buddhachannel.tv