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vén. Shinjin — Il était une Fois… Jésus et Bouddha

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Non, je ne vais pas vous raconter un conte pour enfant, ni un à dormir debout, quoique …. dans le capharnaüm des diverses sources d’informations qui s’étayent ou se contredisent continuelle- ment, la vérité historique est difficile à discerner, on a pas encore fini d’en découvrir…

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Sur un sentier escarpé dans le décor aride des hautes cimes aux confins nord-est du Cachemire, cheminait d’un pas serein un homme, de bonne stature, à la chevelure abondante, aux habits peu communs pour cette contrée. Suivi de quelques fidèles épars, renâclant à l’accomplissement nocturne d’un tel pèlerinage, sa figure rayonnait d’une joie intense, sa respiration, malgré l’altitude, était ample et régulière et son esprit était détendu: il allait enfin Le rencontrer. Depuis près de six cent ans il attendait ce moment privilégié entre tous, voir celui qui l’avait précédé dans le temps, celui qui avait répandu un enseignement similaire au sien, celui avait lequel il avait tant de points communs.

Au détour du chemin, juste après un ravissant stupa dans lequel prônait l’effigie d’une de ses émanations, Il était là assis, vêtu de sa robe de moine à la chaleureuse couleur orange et sa silhouette en posture de méditation, se détachait dans la pénombre de la pré-aurore naissante en l’illuminant d’une intense clarté. L’auguste Pèlerin, ne voulant en aucun cas perturber le Vénérable méditant, s’assit silencieusement en face de Lui, non sans l’avoir préalablement salué avec respect voire dévotion, selon les us et coutumes de sa contrée natale. Sortant progressivement de son extase méditative, le Sage solitaire ouvrit lentement ses yeux, regarda d’abord autour de lui pour ensuite fixer droit son interlocuteur.

Alors, leurs deux regards se croisèrent et, vu l’intensité de cette préhension visuelle, un dialogue s’établit dans des niveaux qui nous sont jusqu’à présents inconnus. Se souriant mutuellement, les rayons qu’ils émettaient, semblables aux rais du soleil perçants les nuages, irradiaient une joie intense, une plénitude transcendante…

Ce fut le Bouddha qui prit le premier la parole: « Bienvenue à Toi, le Nozaréen, je t’attends depuis des siècles. As-tu fais bonne route? » Jésus lui répondit: « La grâce de l’Esprit et la paix intérieure sont en Toi, Vénérable Prédécesseur. » Après des préliminaires conviviaux et chaleureux, ils entamèrent le vrai sujet de leur rencontre:

« Alors, noble Essénien, face à l’humanité toujours en constante contradiction, en souffrance perpétuelle, en errance prolongée, se complaisant dans l’ignorance, qu’as-tu trouvé, depuis le temps écoulé, comme meilleur remède aux maux de l’Humanité? »

« Tathaghâta réalisé, j’ai pris la même voie, comme Toi je suis allé consulter des maîtres, ils m’ont fourni des réponses toutes faites, je n’en fus pas satisfait. Alors, notre pays étant aride et les arbres fort recherchés et peu propices à l’isolement, je suis allé, à Ton exemple, me retrouver solitaire dans le désert, à l’ombre de mon rocher. Là, dans une méditation de plusieurs dizaines de jours, le chemin intérieur s’est accompli. A Ton image, je suis allé au plus profond de moi pour comprendre le mécanisme de l’Homme, comprendre ses joies et ses peines, ses forces et ses faiblesses. Comme Toi, j’ai du affronter le Diable, à savoir mon double dans cette part d’ombre que protège jalousement l’Ego. Comme Toi j’ai du renoncer à la gloire et au triomphe mondain, comme Toi, enfin, j’ai résisté à la tentation de l’illusion du Soi. »

 » Parlons un peu de l’illusion, Toi fils du Père; celle dans laquelle le monde et ses religions se bercent nonchalamment. Le diable, ce cher Mâra, m’as Tu raconté, T’as intimé l’ordre de sauter dans le vide du haut de la falaise devant Ton rocher, arguant qu’étant le Fils de Dieu, ses anges viendraient T’empêcher de T’écraser. Joli récit, mais qu’y a-t-il de vrai là dedans. Es-Tu plus l’enfant de Dieu que moi, ou T’a-t-on désigné, selon la tradition de Ton pays, comme étant l’incarnation du Divin? »

 » C’est une longue affaire, vénérable Muni, la Tradition est la même, nous appartenons tous à cette essence divine, mais ceux qui ont été chargé de nous la transmettre l’ont dénaturée, souvent à leur profit, sans discernement et avec tyrannie. Ils ont mélangé sciemment, par une ignorance mal feinte, les différents messages du Verbe, ils ont occulté la véritable signification de ceux-ci, quand ils estimaient l’avoir plus ou moins compris, afin de ne pas voir les pauvres d’esprit leur ressembler et revendiquer ainsi les mêmes pouvoirs. »

 » Parlons en un peu de ces simples d’esprit, comme Tu dis, Chrestos! Ta tradition n’a-t-elle pas déformé sciemment le sens original, à savoir ceux qui reconnaissaient leur propre ignorance et qui n’avaient qu’un seul désir, y remédier de tout leur être. Il me souvient qu’un homme a simplement touché Ton manteau … il n’avait aucun savoir. »

 » Bien-sûr, à Ton image, ô vénérable Médecin des maux de l’âme, j’ai essayé d’apporter des remèdes: cette fameuse Bonne Parole, que mon église s’est arbitrairement et généreusement attribuée, a été brandie d’une manière erronée et trompeuse comme étendard de nombre de ses exactions justificatoires. Par contre, ceux qui ont fait l’effort de m’écouter, ils étaient pareils à Tes disciples, des gens simples dans leur authentique et sincère recherche d’eux-mêmes. Nous allions visiter les plus en manque de cette connaissance, la partager, coucher et manger à la fortune du pot, faisant pratiquer le don de l’aumône, chez ceux qui en avaient plus. »

« Alors, Ischa, qu’en ont-ils fait de Ton enseignement? Celui-ci ne les a-t-il pas empêcher de s’entre-tuer au nom de l’Amour, ton cheval de bataille, d’accumuler les méfaits en fonction d’une illusion de gloire faussement attribuée à la puissance universelle de celui-ci, dirions-nous plus volontiers? Et qu’ont-ils compris à la joue droite? »

« Saint Josaphat, chez l’homme, la connaissance des choses passe d’abord par le mental, c’est ainsi que l’amour s’explique, se raisonne, se passionne. Tu as parfaitement analysé ce qu’il était, son vécu expérimental, ses mérites et ses extases; quant à moi par contre, j’ai voulu le faire vivre avant tout, « aime les autres comme toi-même » disais-je, mais peut-être ceux qui ont rapporté mes paroles n’ont pas entendu le son du boomerang et que, dans cette sentence, ils se sont oubliés eux-mêmes entraînant leurs prochains dans leur propre ignorance. »

« Tu as vu juste, ô Rabbi Jésus, les croyances occultent souvent la foi, le souci de bien faire empêche souvent la bonne réalisation, la volition dénature trop fréquemment l’action en elle-même l’obviant de la Voie à laquelle elle aspirait. Enfin, l’un comme l’autre, nous avons averti des dangers du Pour au travers duquel l’humanité s’est polarisée dans une dualité compétitive aberrante puis effarante, en oubliant essentiellement le Parce que… ». En conclusion de cet entretien matinal, préludant à beaucoup d’autres, lors de ces retrouvailles cosmiques, ils entonnèrent un chant au Soleil levant, luminaire venant tout juste de poindre au-dessus des cimes enneigées, chant que n’aurait certainement pas renié un certain François d’Assise…

NdlR: que les lecteurs ne s’étonnent pas de certaines appellations données à Bouddha et à Jésus, elles sont justes et elles leur donneront peut-être envie d’en savoir davantage. La Connaissance réside dans le fait d’aller au-delà de ses vues immédiates …


Par le vén. Shinjin

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