Accueil Espace Bouddhiste Interreligieux Histoire du Taoïsme en Chine – jusqu’en 1949

Histoire du Taoïsme en Chine – jusqu’en 1949

103
0

TAOISME

Origine et développement

(6e siècle avant J.C. – 1949 après J.C.)

Les commencements


Lao-Tseu-2.jpgParmi les « cent écoles » qui se sont développées en Chine à partir du sixième siècle avant Jésus-Christ, le taoïsme (de tao ou dao : la voie, la doctrine) est l’une des principales. C’est une combinaison unique et extraordinaire de philosophie et de religion, d’institutions et de mysticisme, de rituels et d’union contemplative, de science archaïque et de pratiques magiques. On le fait couramment remonter à Laozi (6e siècle avant J.C.)2 à qui est attribué le « livre de la vie et de la vertu » (Daodejingqui serait toutefois plus récent 3. L’ouvrage montre le côté mystique et philosophique des ascètes qui ont fui les troubles de la période des rois combattants (475-221 avant J.C.) et se sont retirés dans les montagnes, au contact du Tao de la nature, cherchant à retrouver, à l’encontre des artifices de la culture en vogue, la liberté et la spontanéité primitive, la communion universelle et la vraie sagesse.


D’emblée divers courants apparaissent, expressions de sensibilités différentes et de voies de recherche multiples : le courant plus philosophique et mystique de Laozi ; le courant thérapeutique en quête de santé et de longévité ; des courants tournés vers la géomancie et les secrets de la nature, vers l’art divinatoire des chamanes et des astrologues, vers les prodiges des magiciens et des alchimistes ; enfin le courant naturaliste, anarchiste et apolitique de Yang-zhu (440-360 avant J.C.), victime dans l’histoire chinoise du jugement injuste du plus grand disciple de Confucius, Mencius, qui a fait de lui le promoteur d’un hédonisme débridé.


Tous ces courants se sont rejoints et se mêlent en un même lit aux troisième et deuxième siècles avant Jésus-Christ, surtout dans les ouvrages des magiciens, voyants et maîtres de cérémonie qui s’empressent au service des cours et des familles riches. Ils promettent l’immortalité et créent un panthéon de divinités protectrices autour du culte populaire de Lao-tse et de Huanglao (l’empereur jaune).

L’apogée

Au premier siècle de notre ère se produit le fait principal de l’histoire du taoïsme, son organisation en deux « Eglises » ayant chacune sa structure, sa hiérarchie, son propre rituel pour exprimer le repentir, le jeûne, la réconciliation, le renouveau…, en dépit de leurs désaccords avec le pouvoir impérial pour conquérir leur propre espace géographique. Apparaissent une « Eglise » de l’ouest dans le Sichuan et dans le Shaanxi et une « Eglise » de l’est dans le Shandong.


Le taoïsme absorbe successivement des éléments du bouddhisme venu de l’Inde qui se consolide en Chine et ceux d’autres religions du Moyen-Orient et de l’Asie centrale. Il intègre tous ces éléments à tous les niveaux : doctrinal (panthéon élargi et corpus de révélations plus volumineux), rituel (rites diversifiés selon les besoins individuels et sociaux), institutionnel (hiérarchie plus marquée, avec le titre de tianshi, maître céleste, en 444, qui inaugure la « papauté » taoïste ; rôle mieux défini du clergé, daoshi, qui reçoit des certificats d’ordination ; rédaction du premier catalogue des écritures canoniques en 477 ; début de la vie monastique dans le célibat au sixième siècle).


Avec l’augmentation de son influence qui atteint son apogée sous la dynastie Tang (618-907), le taoïsme redouble ses efforts en vue de sa reconnaissance officielle, tout en rivalisant avec les autres religions pour l’emporter comme unique expression orthodoxe. Ces luttes menées avec un inégal succès s’accompagnent, à l’égard des courants et des groupes tenus pour hérétiques, de mesures d’exclusion qui contribuent à faire naître les sectes et les sociétés secrètes impliquées dans les mouvements politiques. C’est surtout à partir de la dynastie Song (960-1271), avec la conquête du nord du pays par les Mongols en 1127 et sa division, que les sectes se mettent à pulluler. Elles sont souvent en lutte entre elles, faute d’une forte organisation centrale. Parmi les quatre-vingt-six sectes officielles, trois seulement méritent une mention particulière : le Tao de la parfaite vérité ou de la complète perfection (Quanzhen Dao), qui assimile la méditation bouddhiste et les doctrines morales du bouddhisme et du confucianisme ; le Tao grand et vrai (Zhenda Dao), qui promeut l’ascétisme ; le Tao de la grande unité (Taiyi Dao) qui poursuit ses objectifs spirituels en usant des pratiques magiques et des talismans. Sous la dynastie Yuan (1271-1368) émerge au sud de la Chine, précisément dans le Jiangxi, sur le mont Longhu Shan (ou du Dragon et du Tigre), la secte de la parfaite unité (Zhengyi Dao) qui prétend descendre tout droit du premier maître céleste, Zhang Ling. Sous la dynastie Ming (1368-1644) est confié à cette secte l’office impérial de contrôle du taoïsme, avec le droit de superviser toutes les activités taoïstes. En 1447 l’empereur Zheng Tong fait compléter le canon taoïste (Dao Zang


C’est à cette époque aussi que se développe le culte populaire des huit Immortels (Baxian).

Le déclin


Sous les dynasties Ming et Qing (1368-1911) le néo-confucianisme a prédominé en Chine et le taoïsme perd son prestige, surtout auprès des intellectuels qui ne voient plus en lui que basse superstition tant il est mêlé de pratiques de la religion populaire. Les sectes, officiellement excommuniées, restent quant à elles tout à fait libres d’agir au niveau du peuple, tout en s’organisant secrètement à des fins politiques et subversives.


Les Ming et les Qing se sont opposés de toutes les façons au taoïsme qui, de plus en plus réduit à des pratiques superstitieuses et divinatoires, passe au dernier rang des religions, derrière le confucianisme et le bouddhisme. Liang Qichao (1873-1929), un des pionniers du renouveau social de la Chine, va jusqu’à écrire qu’il est « vraiment humiliant » d’avoir à inclure le taoïsme dans l’histoire religieuse du pays, « attendu que le pays n’a tiré aucun profit de son action


L’avènement de la République en 1911 précipite cette évolution. Réformateurs et intellectuels continuent de détester les pratiques taoïstes et leur mépris se manifeste surtout à l’occasion et dans le sillage du « mouvement du 5 mai » (1919) qui se propose de détruire la vieille tradition, tenue comme désormais dépassée.


En 1920 une loi du gouvernement nationaliste sur la conservation des temples ne permet de maintenir que les temples dédiés à des personnages ou à des sages fameux et exemplaires. Les temples dédiés aux divinités des éléments et des phénomènes naturels sont tous proscrits, ainsi que l’usage des enchantements, formules magiques et talismans typiques du taoïsme et de la religion populaire. La loi n’est pas appliquée avec rigueur, mais bien des autorités locales exproprient les temples et les affectent à d’autres usages.


En 1931, c’est auprès des taoïstes du mont Wudang Shan (Hubei) que trouve refuge et assistance médicale la troisième armée rouge, mais au moment même où les troupes communistes attaquent le siège central de la secte Zhengy sur le mont Longhu Shan (Jiangxi). Elles l’incendieront en 1948 et disperseront ses adeptes. Le soixante-troisième « maître céleste », Zhang Enbu, après diverses péripéties, se réfugiera à Taiwan en 1950. Pendant la guerre contre le Japon (1937-1945) et l’occupation du pays, le clergé du taoïsme et ses fidèles apportent leur contribution à la résistance, jusqu’au don de leur vie, comme les daoshi tués sur le mont Mao Shan (Jiangsu) en 1938.


www.buddhachannel.tv

Previous articleFrancis Joyon : Un message écologique à grande vitesse
Next articleVoyageur au coeur des Religions