La Chine va organiser prochainement un important « sommet politique sur les religions », le premier du genre depuis une dizaine d’années. Le président chinois Xi Jinping pourrait présider la réunion en personne, avancent divers articles de presse.
Chen Zhongrong, vice-directeur de l’Administration d’État pour les Affaires religieuses, qui a rang de ministère dans l’appareil gouvernemental chinois, a livré cette information mardi 10 novembre à l’occasion d’une rencontre avec des responsables religieux.
Le site de l’Administration d’État pour les Affaires religieuses parle d’une réunion du gouvernement central sur la religion « cette année ». Le sommet traitera notamment de la formation « intensive » des responsables religieux locaux.
Depuis le début de cette année, Yu Zhengsheng, membre du Comité permanent du Bureau politique du Parti, la plus haute instance dirigeante du pays, et successeur de Xi Jinping à la tête du Parti communiste de la ville de Shanghai, multiplie les visites auprès des institutions religieuses.
SINISATION
La seule déclaration de politique générale au sujet des religions remonte au mois de mai dernier, lorsque le président Xi Jinping a, dans un discours au Front uni, insisté sur la « sinisation » des religions en Chine. Le concept de « sinisation » des religions, qui n’est pas une nouveauté dans la bouche des dirigeants chinois, recouvre l’autonomie des religions par rapport à toute autorité étrangère, et l’adaptation de celles-ci aux valeurs « socialistes » du régime.
Ces derniers mois toutefois, des « séances de travail » ont eu lieu dans la quasi-totalité des provinces du pays avec pour thème : « Sinisation des religions et christianisme ». Dans les provinces du Guizhou et du Shandong notamment, les responsables catholiques « officiels » ont dû y prendre part début novembre, soit quelques jours après le passage à Pékin, du 11 au 16 octobre 2015, d’une délégation vaticane à Pékin.
En mars dernier, le directeur de l’Administration d’État pour les Affaires religieuses, Wang Zuo’an, avait expliqué qu’il était temps de réviser les règles administratives encadrant les religions, si possible dans le cours de l’année 2015. Interviewé par le Wenweipo, quotidien hongkongais pro-Pékin, Wang Zuo’an citait notamment de nouveaux problèmes dans la gestion des religions, comme les droits de propriété ou l’usage d’Internet par les religieux et les croyants.
Pour l’instant, de nouvelles réglementations religieuses ont surtout été appliquées localement. Ainsi dans le Zhejiang, les églises et temples protestants ont dû démonter les croix qui surplombaient les édifices. La dernière en date a eu lieu à l’église Shizhu, dans la ville de Taizhou, fin novembre, après plus d’un mois sans destruction.
ISLAM, BOUDDHISME
Les musulmans ouïghours du Xinjiang se sont quant à eux vu imposer une succession de règles au niveau local, ou au niveau de la province, allant de l’interdiction du port de la barbe ou du voile intégral à l’interdiction de la pratique du jeûne du Ramadan pour les fonctionnaires et les étudiants. Les tee-shirts et les drapeaux portant le croissant islamique, assimilés à des symboles indépendantistes en faveur du Turkestan oriental, sont également interdits.
Le bouddhisme tibétain n’est pas épargné. Dans plusieurs articles et éditoriaux, la presse officielle chinoise a insisté sur le droit de regard de Pékin dans le processus de choix de la future réincarnation du dalaï-lama. Le contrôle des temples dans la Région autonome du Tibet et dans les zones tibétaines des provinces limitrophes a lui aussi été renforcé.
Depuis le dernier sommet du Parti consacré à la religion, en 2001, le nombre de Chinois pratiquant une religion a explosé. Selon une étude américaine du Pew Research Centre, on compterait 58 millions de protestants et neuf millions de catholiques en 2010, avec une progression d’environ 10 % par an.
L’attitude des autorités chinoises à l’égard des religions semble osciller entre instrumentalisation intéressée et méfiance viscérale, observe Églises d’Asie, l’agence de presse des Missions étrangères de Paris.
Source: La Croix