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Le Voleur de sac à dos

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Les émotions tempérées, nos amis reprennent la route.

En compagnie de Makimoko bien sûr. Avec sa longue queue rayée et ses lunettes noires, la mascotte de la famille contribue largement aux joies de la petite troupe.

Vu son chargement, Dachen est convié à ouvrir la voie afin de prendre un peu d’avance Pour des questions de sécurité, Lama TeuTsé ferme la marche.

Pour tous les enfants du monde : les contes de Momo Belmo
Pour tous les enfants du monde : les contes de Momo Belmo
– Aujourd’hui c’est terminus La Plaine des Cafres.

– Tu parles d’une sortie ! Y’a rien là-bas ! On va pas se marrer Déjà que j’suis crevé, ronchonne Dachen.

– Ça m’aurait étonné qu’il râle pas celui-là ! T’avais qu’à en prendre moins ! Encore heureux que t’as pas fait comme l’escargot, pris toute ta case sur le dos ! Remarque, tu marches moins vite qu’un escargot, une vraie limace !

– C’est sûr que traîner tous ses désirs ressemble parfois à tirer un boulet, insinue discrètement Lama TeuTsé.

– Le plus léger, c’est moi. Rien à porter, la vie est belle, chante Makimoko en gambadant.

Entre ce qu’il me faut et ce dont j’ai vraiment besoin…



– C’est pas des désirs, c’est c’qui m’faut. J’y tiens. Impossible de faire autrement.

– Oui, c’est bien ce que je dis, tu ballades tes attachements. Remarque, Mimose, n’est pas mal chargée non plus. Êtes-vous vraiment sûrs d’avoir besoins de tout cela ?

Pour toute réponse, Dachen amorce un haussement d’épaules et marmonne en direction de Mimose

– Tu parles, y connaît rien à la vie le lama ! Y’commence à nous gonfler avec ses conseils !

– De qui tu parles, lui répond sa sœur ? Du Lama ? ! Ben dis donc !

Comprenant son erreur, Dachen se tourne vers Lama TeuTsé :

– Ben oui, j’en ai besoin. Je sais bien que j’ peux pas m’en passer. Je les ai toujours avec moi, je les lâcherai jamais.

Le Grand lama connaît la portée d’un dialogue de sourds…

Qui sera le plus heureux ? Lama Teu Tsé avec son petit sac ou Dachen avec son gros sac ?
Qui sera le plus heureux ? Lama Teu Tsé avec son petit sac ou Dachen avec son gros sac ?
Voilà tout à coup que Makimoko semble effrayé ? Ses poils se hérissent, il crie, il recule, on dirait qu’il va tomber à la renverse. Mimose s’approche pour le rassurer, il grogne encore plus fort. Lui, si calme d’habitude, tout juste si on ne craindrait pas qu’il morde quelqu’un.

– Ne t’en fais pas Makimoko, y’a pas de danger. Tout va bien.

Mais les cris augmentent, et s’accélèrent. Makimoko semble ne plus être lui-même. Lama TeuTsé tente aussi de l’apaiser. Rien n’y fait. Les yeux de Makimoko vont lui sortir de la tête. Tout ce qu’on tente ne sert à rien. Jusqu’au moment où Dachen réalise :

– J’ai tout compris ! C’est encore Zhang ! Je le croyais toujours en prison : je suis sûr que c’est lui !

– En prison ?

– Ben oui ! C’est le chercheur d’or ! Je le croyais encore en prison celui-là ! Quand je suis arrivé, il est parti en courant et j’ai trouvé Makimoko avec une patte cassée, tout plein de sang, frissonnant comme tout de suite et presque mort. Vous devez bien tous vous rappeler ?

– Oui, mon petit. Je revois tes yeux emplis de tristesse et de terreur. Il est vrai que ces chercheurs d’or espérant gagner 35 € par gramme d’or trouvé, arrivent de toutes les villes. Plus affamés les uns que les autres, ils mangent parfois des lémuriens.

C’est le temps passé pour sauver Makimoko qui le rend encore plus précieux…

Makimoko a raison d'avoir peur
Makimoko a raison d’avoir peur
Mimose confirme l’arrivée de Makimoko :

– Et tous les soins qu’on lui a donnés. Maman lui faisait son pansement tous les jours. Papa coupait cueillait ses meilleurs fruits.

A peine si on l’entend, Lama TeuTsé précise :

– Je le dis en passant, Makimoko, il est végétarien, lui.

Puis, un peu plus fort :

– Et toi mon petit Dachen, je t’entendais la nuit quand tu traversais la maison tout doucement pour aller le voir. On peut dire que tu t’es bien occupé de lui. Toute la famille. Je ne l’ai jamais dit, mais moi, je priais Bat Kannon plusieurs fois par jours.

– Et maintenant, on n’imaginerait pas la famille sans lui. Ce serait comme si on nous coupait un membre.

Pendant que chacun y va de son couplet, la situation s’aggrave.

Le pauvre Makimoko se met à trembler, il frissonne comme Mimose quand elle a 40 de fièvre. Les deux enfants aussi sont agités de soubresauts. Dachen, à son tour, semble pris de convulsions. Revit-il un évènement douloureux ?

– J’ai peur ! Ça me rappelle le jour où j’ai trouvé Makimoko. Je suis sûr qu’il sent le braconnier. Il va s’enfuir. On va le perdre dans la ravine. Attrapez-le !

Préserver une espèce menacée : le Lémurien

... Quand on voit comment il aurait pu finir
… Quand on voit comment il aurait pu finir
Et comme par magie, – quelle vision d’épouvante ! apparaît sous le yeux d’un Dachen ahuri… le braconnier !

-J’ai peur ! Lama j’ai peur !

Chacun pose son sac et tente d’apprivoiser Makimoko. Rien n’y fait, il continue à pousser des cris de terreur. Dachen propose carrément d’aller tuer le braconnier.

– Comme ça, il nous fichera la paix !

– La paix ? Crois-tu vraiment Dachen ?

Le silence éloquent de Dachen répond à sa place.

S’approchant tout doucement de Makimoko, il lui parle à voix basse et réussit à le prendre dans ses bras. Couvert de caresses et de mots doux, Makimoko se calme et la petite troupe reprend son chemin.

Si le cyclone a fait une coupe au carré à tous les bambous, l’océan reste beau : des milliers de diamants scintillent sur l’eau, c’est féérique.

En veine de poésie, Mimose, achève de détendre Dachen :

– C’est drôle, on croirait que l’eau, elle accepte tout ! Elle passe partout entre les cailloux, elle reçoit toutes les étoiles sur elle, elle charrie la boue, elle s’allonge sur le sable, elle fait le gros dos et pourtant, toujours elle continue sa vie. Nuage ou neige…

– Oh la neige : Je voudrais tellement la voir ! Eric Gay, je suis sûr qu’il m’emmènera la voir la neige !

Dans sa grande sagesse, Lama TeuTsé laisse vivre ce moment de paix et… d’illusions. Bah, il comprendra le moment venu, pense t-il en son for intérieur.

C’est Mimose qui rompt le charme :

– Les émotions ça creuse ! J’ai une de ces faims !

– Oh oui ! J’ai les crocs ! On n’a qu’à s’arrêter.

Puisque Lama est d’accord, y’a plus qu’à… Le grand banian fera office d’ombrière.

Les enfants étalent Makimoko sur un tas de feuilles fraîches tandis que Mimose étale son pâté sur sa tartine. Lama boit un grand verre d’eau. Les papilles de Dachen dansent la java : Maman lui a préparé tout plein des ses merveilleux momos. Avec un bon achard-légumes « sans piment ».

Lama Teu Tsé tout en douceur et… tout efficace

– Vous en voulez Lama TeuTsé ?

Avec son inaltérable sourire, un rien moqueur, Le Grand lama de répondre :

– Sers toi d’abord mon petit.

Et là ! Ô rage ! Ô désespoir ! Il a beau tourner, virer, chercher, s’injurier, le malheureux Dachen découvre l’horreur : son sac à dos a disparu. Rouge de colère, il hurle :

– Qui m’a pris mon sac ? C’est encore un coup de Zhang ! Il me l’a volé ! Il m’en veut parce que je l’ai dénoncé ! Il s’est vengé quand il nous a vus ! Quand j’vous disais qu’on aurait mieux fait de s’en débarrasser !

Tout à coup moins fatigué, d’un bond il se lève :

– Je vais aller lui dire c’ que je pense à ce voleur !

Mimose avance avec prudence, on connaît les colères de Dachen…

– T’en as au moins pour deux heures ! Et tout seul ! Tu crois pas qu’on va venir avec toi pour y retourner ?

– Qu’est-ce que j’vais devenir ! J’ peux plus vivre ! Et Maeva ? Comment je vais lui envoyer des SMS ? Et ma musique ? Et Redtiger : je devais chatter avec Eric. Et…

– Et crois-tu que tu ne peux vraiment pas vivre sans tout cela ?

– J’en suis plus que sûr ! Vous connaissez rien à la vie, vous !

– OK, je ne connais rien à la vie d’un jeune garçon. Je n’ai jamais été un enfant. Tu as raison je ne connais rien à la vie que tu vis, c’est vrai. Mais toi, en connais-tu une autre que la tienne ?

Touché ! Dachen s’emporterait bien un peu mais vu ce que lui a dit Lama hier…

– Comment voulez-vous qu’j’fasse ? C’est pas possible !

– Si, – c’est pas possible, que proposes-tu ?

– Je vais y retourner. Je lui casserai la figure. J’ai besoin de personne.

– Si tu permets mon petit Dachen…

– D’abord, je suis plus petit ! Je suis assez grand pour me débrouiller tout seul ! Vous verrez quand…

– D’accord ! Toutefois, si tu permets Dachen, je te rappelle que sur ce chemin on ne peut pas faire demi tour. Impossible de retourner en arrière. Nous ne pouvons jamais réécrire l’histoire de notre vie. Ce qui est passé est passé.

Mimose compatissante propose :

– Et si on partageait ? J’ai bien trop à manger pour ce midi. On a de quoi et après on verra.

Contre toute attente, Dachen acquiesce du bonnet. On ne l’entend plus, quand tout à coup il se réjouit :

– Heureusement qu’on va trouver la tablette magique ! Comme Lama a dit qu’elle allait nous enrichir on aura plein d’argent pour racheter tout ce qu’on m’a pris. Et en mieux ! Je pourrai avoir un vrai sac à dos avec une serrure à code pour cacher la tablette, un IPAD dernier cri, et un nouvel appareil photos bien mieux que mon vieux machin. Heureusement que j’avais gardé mon canif et ma gourde à ma ceinture. En plus que Mimose, tu gagneras un truc de plus pour ta collection, ce super truc qui rend heureux pour toujours.

– Si tu le dis… A propos, Mimose, qu’est-ce qui t’a rendu heureuse sur ce chemin ?

– Tout ! Plein de choses !

– En fin de conte, c’est bien ce que dit le Bouddha :

Il n’y a pas de chemin pour le bonheur, le chemin EST le bonheur…




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