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Au Bhoutan, les jeunes ne connaissent pas «le royaume du bonheur»

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Des jeunes filles du Bhoutan sourient en interprétant une danse traditionnelle, le 2 juin 2013 à Thimphou (Photo Roberto Schmidt. AFP)
Des jeunes filles du Bhoutan sourient en interprétant une danse traditionnelle, le 2 juin 2013 à Thimphou (Photo Roberto Schmidt. AFP)

Par AFP

Le Bhoutan, petite nation traditionnelle de l’Himalaya, coincée entre la Chine et l’Inde, est célèbre pour son indice de «Bonheur national brut», qui veut donner la priorité au bien-être sur la croissance économique. Mais la jeunesse récuse de plus en plus sa réputation de pays du bonheur.

L’ancien roi du Bhoutan avait inventé dans les années 70 ce concept, qui est devenu un indice de développement dans le monde entier, se substituant à la simple mesure quantitative du Produit National brut (PNB).

Selon ce concept, on mesure le bonheur des habitants d’un pays, non seulement en fonction de la croissance économique, mais en prenant en compte aussi d’autres critères: la sauvegarde de la culture, de l’environnement et la bonne gouvernance.

Mais pris dans la mondialisation, le Bhoutan qui a autorisé les premiers touristes en 1974, la télévision en 1999 et la démocratie en 2008, semble avoir perdu une certaine harmonie ancestrale.

«On peut voir que les gens ne sont pas heureux ici», assène Jigme Wangchuk, travailleur social et ancien drogué, dans la capitale Thimphou où il oeuvre dans un centre d’accueil pour les jeunes toxicomanes.

«Nous faisons face à de nombreux défis et beaucoup de gens souffrent», ajoute le jeune homme de 24 ans auprès de l’AFP.

Les autorités s’inquiètent de la consommation croissante de drogues, y compris chimiques, dans ce pays isolé du monde pendant des siècles.

La consommation d’alcool, notamment un vin de riz fermenté fabriqué artisanalement, a toujours fait partie de la culture bhoutanaise. Mais les maladies de foie sont devenues une des principales causes de décès au grand hôpital de la capitale de ce pays de 750.000 habitants, selon des statistiques nationales publiées en 2012.

Le Bhoutan n’avait ni routes, ni téléphone, ni monnaie jusque dans les années 1960. Il ne s’est ouvert au monde extérieur que dans les années 1970. Mais il sélectionne encore ses touristes, souvent des trekkeurs fortunés, en accordant des visas à 200 dollars la journée.

Monarchie absolue jusqu’en 2008, le pays est désormais une monarchie parlementaire où le bouddhisme demeure religion d’Etat et imprègne la vie quotidienne. Mais le tissu social traditionnel se déchire peu à peu.

«Le taux de criminalité augmente chaque année, avec l’apparition des cambriolages ou des vols dans la rue, des délits totalement inexistants il y a dix ans», souligne Damber K. Nirola, un des deux seuls psychiatres exerçant dans un pays de quelque 750.000 habitants.

Selon le psychiatre, le chômage, avec la toxicomanie et l’alcoolisme qui l’accompagnent, est le principal défi que va devoir relever le pays.

Ces problèmes peuvent sembler incongrus dans ce pays bouddhiste aux paysages enchanteurs, qui a donné naissance au concept de BNB, loué à l’étranger et thème de «conférences du bonheur» organisé dans le petit pays himalayen.

Mais des habitants de la capitale se montrent moins enthousiastes.

La Commission du BNB, l’agence de planification du pays, examine toutes les mesures économiques pour s’assurer qu’elles correspondent aux principes du BNB. Les Bhoutanais adhérent au principe, mais ont leurs doutes sur son application.

«Quand je regarde les difficultés du pays, je ne vois pas de BNB», déclare Jamyang Tsheltrim, un étudiant de 21 ans dans une salle de billard de Thimphou. Au premier rang de ses inquiétudes, l’absence d’emplois qualifiés pour les jeunes d’un pays, dont la moyenne d’âge est de 26 ans.

Le taux de chômage officiel était de 7,3% en 2012 chez les jeunes, contre 12,9% trois ans avant, mais ces chiffres suscitent quelques doutes.

Les emplois qualifiés pour les Bhoutanais éduqués sont limités à un secteur privé embryonnaire. Les travaux manuels dans le secteur du bâtiment, en plein essor, sont laissés aux Indiens qui ont traversé la frontière.


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