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Kukkurajataka — Le jataka du chien

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05.08.2010

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Jadis régnait Brahmadatta, à Bénarès. Par un acte correspondant, le Bodhisatta prit naissance sous la forme d’un chien. Il vivait dans un immense terrain mortuaire en compagnie de plusieurs centaines de chiens. Un jour, le roi fit atteler les chevaux blancs du Sindhu à son carrosse richement orné et se rendit dans ses jardins d’agrément. Il se promena pendant le reste de la journée, puis retourna en ville au moment où le soleil se couchait. Les harnais furent laissés dans la cour royale, dans la même position que s’ils étaient encore attelés. Il plu pendant la nuit et ils furent trempés. Les chiens de garde du roi descendirent des étages supérieurs du palais et mangèrent le cuir et les courroies du carrosse. Le jour suivant, on dit au roi : « Deva, des chiens se sont glissés par une brèche et ont mangé le cuir et les courroies du carrosse. » Le roi, furieux contre les chiens, dit : « Dès que vous verrez un chien, vous devrez le tuer ! »

À partir de ce jour-là se mit en place une vaste extermination des chiens. Dès qu’un homme les apercevait, les chiens se faisaient tuer. Alors ils s’enfuirent et se rendirent auprès du Bodhisatta, sur le terrain mortuaire. Le Bodhisatta demanda : « Vous vous êtes rassemblés ici en grand nombre. Quelle en est la raison ? » Ils répondirent : « Le roi est furieux parce que des chiens ont mangé le cuir et les courroies de son carrosse, au palais royal. Il a ordonné qu’on tue tous les chiens. De nombreux chiens ont été massacrés, une peur immense est apparue. » Le Bodhisatta pensa : « Cet endroit est tellement bien gardé qu’il n’y a aucun moyen pour des chiens de s’introduire de l’extérieur. Ceci a été fait par les chiens de garde, à l’intérieur même du palais royal. Il n’arrive rien aux voleurs alors que les non-voleurs sont tués. Et si je montrai au roi qui sont les voleurs afin de sauver la vie de mes compagnons ? » Il rassura ses compagnons avec ces mots : « N’ayez pas peur !Je vais obtenir votre absolution. Restez ici pendant que je vais voir le roi. » Il évoqua les dix paramitas en esprit, prit l’amitié pour guide et ordonna : « Que personne ne puisse me lancer une motte de terre ou un bâton ! » Il se rendit en ville tout seul. Aucun homme ne s’en prit à lui en le voyant.

Après avoir ordonné l’extermination des chiens, le roi s’assit sur son trône de juge. Le Bodhisatta se rendit là-bas et d’un bond se glissa sous le trône du roi. L’entourage de ce dernier tenta de l’en chasser, mais le roi le leur interdit. Après s’être un peu reposé, le chien sortit de dessous le fauteuil, rendit hommage au roi et demanda : « Deva, avez-vous ordonné la mort des chiens ? » « Oui, » fut la réponse. « Narinda, de quoi sont-ils responsables ? » « Ils ont mangé le cuir et les courroies de mon carrosse. » « Savez-vous qui les a mangés ? » « Nous ne le savons pas. » « Si vous ne savez pas qui sont précisément les mangeurs de cuir et les voleurs, alors il n’est pas juste de laisser les chiens se faire tuer dès qu’un homme les aperçoit, Deva. » « J’ai ordonné le massacre des chiens avec ces mots :  » Les chiens ont mangé les lanières de cuir de mon carrosse. Dès que vous en verrez un, vous devrez le tuer !  » » « Votre personnel doit-il tuer tous les chiens, ou y-en-a-t-il qui échappent à la mort ? » « Il y en a qui y échappent, les chiens de garde de mon palais ne sont pas tués. » Le Bodhisatta dit alors : « Maharaja, vous venez juste de dire :  » J’ai ordonné le massacre des chiens. Les chiens ont mangé les lanières de cuir de mon carrosse. Tout homme qui verra un chien devra le tuer.  » Maintenant vous dites :  » Les chiens de garde de mon palais ne seront pas tués.  » En vous comportant ainsi, ne vous appuyez-vous pas sur une préférence et sur d’autres motivations néfastes ? Les motivations néfastes ne sont pas correctes, elles ne sont pas dignes d’un roi. En de telles circonstances, un roi se doit d’être aussi impartial qu’une balance. Or, les chiens de la cour royale ne sont pas tués, contrairement aux chiens miséreux. Tel que cela se passe aujourd’hui, il ne s’agit pas de tuer tous les chiens, mais de ne tuer que les chiens miséreux. » Là-dessus le Grand Être dit d’une voix douce : « Maharaja, ce que vous faites n’est pas équitable. » Après avoir proclamé le Dhamma au roi, il exposa ce gatha :

Les chiens qui sont nés à la cour du roi,
Les sophistiqués, les beaux, les forts,
Ne sont pas tués. C’est nous qui sommes tués.
Ceci n’est pas une tuerie juste. C’est seulement le massacre des faibles.

Ayant écouté les paroles du Bodhisatta, le roi dit : « Pandita, sais-tu qui a mangé les courroies du carrosse ? » « Oui, je le sais. » « Qui les a mangées ? » « Qu’est-ce qui te fais dire que ce sont eux qui les ont mangées ? » « Je vais prouver que ce sont eux qui les ont mangées. » « Prouve-le, Pandita. » Là-desssus, le Bodhisatta dit : « Fais venir tes chiens de garde ici, au palais. Fais aussi apporter du babeurre et de l’herbe kusa. » Le roi agit en conséquence. Le Bodhisatta dit alors : « Faites tremper cette herbe dans le babeurre, puis faites boire le babeurre aux chiens. » Le roi fit comme il lui était dit et fit boire le babeurre aux chiens. Les chiens eurent à peine bu qu’ils régurgitèrent le cuir.

Le roi fut aussi ravi que s’il avait reçu l’avis d’un Bouddha omniscient. Il rendit hommage au Bodhisatta en lui offrant une ombrelle blanche. Le Bodhisatta instruisit le roi par ces paroles :

« Marche dans la vertu, Maharaja issu d’une lignée royale. »

Il exposa dix versets concernant la façon de marcher dans la vertu du Dhamma. Il s’agit des versets donnés dans le Tesakunajataka. Il dit : « Maharaja, sois inébranlable. » Il le lia aux Cinq Préceptes. Le roi lui donna de nouveau l’ombrelle blanche. Le roi ayant prit connaissance de l’enseignement du Bodhisatta, assura à tous les êtres qu’il pourraient vivre en sécurité et garantit à tous les chiens, et au Bodhisatta le premier, une nourriture constante et semblable à la sienne propre. Il respecta l’exhortation du chien, donna des aumônes et accomplit d’autres actes positifs. En mourant, il prit renaissance dans le monde des dévas. L’exhortation du chien perdura encore pendant dix mille ans. Le Bodhisatta, après avoir vécu le reste de sa vie, accéda lui aussi au lieu de ses mérites.

Après avoir terminé cet enseignement par ces mots : « Bikkhus, ce n’est pas la première fois que le Tathagata agit pour le bien de ses proches. Il l’a déjà fait par le passé. », le Maître clarifia ce qui liait les deux événements et y associa les naissances comme suit : « A cette époque, Ananda était le roi; la communauté du Bouddha était représentée par son entourage; et j’étais le chien. »


Source: Jatakamala

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