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Bonheur, prospérité, longévité ! Nouvel an chinois !

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Toute l’Asie de l’est ne fêtera pas l’entrée dans l’année du Tigre le 14 février 2010. Ce ne sera le cas que pour le Viet Nam, le Tibet et la Chine, qui suivent la tradition bouddhiste du « Grand Véhicule ». Le Cambodge, la Thaïlande et le Laos suivent l’autre tradition bouddhiste, celle du « Petit Véhicule », qui a fixé de façon définitive la date du Nouvel An le 13 avril. Officiellement, la Chine a adopté en 1912 notre calendrier grégorien, qui fixe donc le Nouvel An au premier janvier. C’est pourquoi, en Asie, le Nouvel An est désormais plutôt nommé la Fête du Printemps, en cela qu’elle annonce, surtout au Viet Nam où le climat est globalement plus chaud, l’arrivée de cette saison.

Le Nouvel an chinois – Douze animaux et cinq éléments

hunian.gifLorsque Bouddha convia les animaux à venir le rejoindre pour fêter avec lui le Nouvel An, seuls douze d’entre eux répondirent à son invitation. Ils arrivèrent dans un ordre très précis. Tout d’abord le rat, puis le buffle, le tigre, le lièvre, le dragon, le serpent, le cheval, la chèvre, le singe, le coq, le chien, et enfin le cochon, le plus flegmatique de tous. En réalité, le buffle était arrivé le premier, mais le rat, malin comme un singe, s’était posé sur son dos. Au dernier moment, il fit un bond, le dépassa, et se présenta donc devant le Bouddha avant son compagnon de route. L’animal fit pire encore : il mentit au chat en lui racontant que le rassemblement aurait lieu plus tard. Le chat partit donc bien après les autres et arriva treizième. C’est pour cette raison qu’il n’apparaît pas dans l’astrologie chinoise. En revanche, il a été réhabilité au Viet Nam, où il remplace le lièvre dans le calendrier. Et c’est depuis ce jour que le rat et le chat sont ennemis jurés. C’est également depuis ce jour que, suivant une promesse faite par Bouddha aux animaux venus le rejoindre, un animal est mis à l’honneur chaque année, suivant scrupuleusement l’ordre d’arrivée des douze animaux de la légende.

Pour résumer la manière dont l’année est déterminée dans le calendrier traditionnel chinois, ces douze animaux (dont l’un mythique, le dragon) forment une phase, qui se renouvelle, une fois achevée et en se combinant aux « cinq éléments », à l’intérieur du cycle de soixante années. Le cycle dans lequel nous nous trouvons a débuté en 1984 et s’achèvera donc en 2044.

Entrent donc également en jeu dans cette roue du temps les cinq éléments que sont le bois, l’eau, la terre, le métal et le feu. Sans que l’on sache exactement pourquoi, les cycles d’apparition de ces éléments peuvent être différents en Chine et au Viet Nam. Par commodité, nous retiendrons ici le système chinois. Cette année, la Chine fêtera le Tigre de Métal. Chaque élément est, de plus, associé à une couleur. Le bois est vert, l’eau est noire, la terre est ocre ou jaune, le métal est blanc et le feu est rouge. On nomme parfois l’année en citant l’animal suivi uniquement de la couleur de référence de l’élément associé. Cette nouvelle année qui débute le 14 février 2010, et que plus du quart de la population mondiale (sans compter celle du Viet Nam) fêtera, est donc celle du tigre blanc.

Cette utilisation en Chine des cinq éléments, et leurs relations entre eux rappelle étrangement la croyance de certains philosophes grecs de l’Antiquité, dits « philosophes de la nature », pour qui tout découlait soit d’un seul élément, tel Thalès qui pensait que l’eau était à l’origine de toute chose, ou de combinaisons de plusieurs éléments de la nature, tel Empédocle qui conçut le monde comme étant plutôt l’alliance de quatre éléments primitifs : la terre, l’air, le feu et l’eau qui, en se combinant, donnaient naissance à tout ce qui existait sur Terre.

Il ne faut cependant pas chercher à créer trop d’analogies entre les théories de ces philosophes et le système des cinq éléments du calendrier chinois. Ces cinq éléments n’ont en effet pas de caractère créateur sur les autres choses du monde, mais seulement des relations d’engendrement ou de destruction. Ainsi, le bois engendre le feu, qui engendre la terre, qui engendre le métal, qui engendre l’eau qui finalement engendre le bois. L’eau détruit le feu, etc.

Ces cinq éléments du calendrier chinois ont également été choisis en fonction des cinq planètes principales de notre système solaire, que les astronomes observaient dans la Chine ancienne. Le bois est associé à Jupiter, l’eau à Mercure, la terre à Saturne, le métal à Vénus et le feu à Mars.

Le calendrier chinois est donc basé sur les connaissances en astronomie, ce qui le rapproche de notre vision occidentale, mais également sur des facteurs culturels et spirituels.

Le rapport au temps des humains est également différent en Asie et en Occident. Au Viet Nam, la tradition ancienne veut que l’on fête son anniversaire le jour du Nouvel An. En Chine, on le fête le septième jour suivant la nouvelle année. De plus, on commence à décompter l’âge à partir de la date de procréation et non à partir de celle de la naissance. Ainsi, un enfant né un mois avant la Fête du Printemps aura officiellement deux ans après la fête, alors qu’il n’aura en réalité, selon notre conception occidentale du monde, que quelques semaines de vie derrière lui.

Du fait de la combinaison de nombreux facteurs, les calculs pour déterminer la date du Nouvel An sont très compliqués, cependant, le Nouvel An tombe systématiquement entre le 21 janvier et le 20 février inclus. Bien entendu, toutes les célébrations liées à celles du Nouvel An ont par conséquent des dates variables. Il en va ainsi de la Fête du Dieu du Fourneau (dont nous verrons l’explication plus loin), qui a lieu quelques jours avant la Fête du Printemps, ou de la Fête des Lanternes, qui clôture quelques jours plus tard les festivités.

De même, les autres fêtes chinoises de l’année, comme la fête de la mi-automne, durant laquelle on déguste les délicieux petits Gâteaux de Lune, ou la fête des bateaux-dragons, ont des dates de célébration variables selon les années.

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Les célébrations précédant la Fête du Printemps

Les célébrations du Nouvel An commencent, en Chine comme au Viet Nam, par un nettoyage complet et approfondi de la maison, qui a lieu normalement le vingtième jour du douzième mois lunaire, quelques jours avant la Fête du Printemps, donc. On dit en Chine que l’on « balaye l’ancien pour accueillir le nouveau ».

Au Viet Nam, si la maison est soigneusement nettoyée en prévision des festivités, le balai devient un élément tabou à ne pas utiliser le jour du Têt (de son nom complet et exact, tel qu’il a été trouvé sur internet : « Lễ Tết Nguyên Ðán », -avec le ‘d’ barré qui se prononce ‘ye’-, qui signifie Fête du Premier Jour, d’autres fêtes traditionnelles ayant donc elles aussi un nom commençant par le terme « Têt », comme le « Têt Trung Thu », fête de la mi-automne, que l’on retrouve donc également au Viet Nam.)

Que l’utilisation du balai soit interdite le jour du Nouvel An provient d’une variante d’une légende. Autrefois, une jeune servante qui travaillait dans les cuisines célestes se montra trop gourmande, piochant systématiquement dans les plats qu’elle préparait. En guise de punition, elle fut exilée sur terre, réincarnée en balai et condamnée à trimer sans relâche, n’ayant droit qu’à une seule journée de repos dans l’année, fixée au jour de l’an.

Un certain nombre d’interdits sont d’ailleurs posés pour la fête du Nouvel An. Les paysans ne peuvent pas travailler la terre, par exemple. Ce que l’on fait ou ne fait pas le jour du Têt détermine la qualité de l’année à venir. Ainsi, on est extrêmement vigilant au Viet Nam au sujet de la première personne qui vous rend visite pour vous souhaiter le Nouvel An, et franchit donc le seuil de votre maison. Selon son statut dans la société, son état marital, son état de santé, elle portera chance ou malchance à votre famille. Certains chefs de famille ont trouvé une bonne astuce pour contourner le problème. Aux douze coups de minuit, ils sortent de chez eux pour y rentrer aussitôt après.

Quelques jours avant le Nouvel An (premier jour du premier mois lunaire), on célèbre en Chine Zaowangye, le Dieu des Fourneaux, qui trouve son équivalent au Viet Nam avec Ông Táo, le Génie du Foyer. On parle en effet de ‘Dieux’ en Chine, et de ‘Génies’ au Viet Nam. Là encore, la raison de leur existence est expliquée par des légendes anciennes, dont les variantes, régionales ou non, sont nombreuses. Un point commun de ces variantes est que ces Dieux ou Génies séjournent toujours dans la cuisine, et que leur existence à un rapport avec un drame conjugal, dont voici un exemple.

Un couple est contraint de se séparer, par exemple parce que le mari, très pauvre, doit partir faire fortune ailleurs. Au bout de nombreuses années d’attente, voyant que son époux ne revient pas, l’épouse finit par accepter, la mort dans l’âme, la proposition de remariage d’un autre homme. Mais voilà que seulement quelques mois plus tard, l’époux revient au village ! Dans certaines légendes, il est devenu mendiant. Il frappe à une porte, sans savoir que son ancienne épouse vit dans la maison. De honte, il se cache alors dans le fourneau de la cuisine, où il périt par les flammes. Désespérée par la mort de son premier époux qu’elle avait reconnu, la femme met fin à ses jours, suivie peu de temps après par le second époux, qui se sent responsable de tous ces malheurs. C’est pourquoi, de nos jours, trois briques symbolisent dans les cuisines traditionnelles vietnamiennes les trois époux sacrifiés de la légende.

Emu, l’Empereur de Jade (divinité centrale du Taoïsme, présente à la fois en Chine et au Viet Nam) qui trône dans son Palais Céleste, décide alors de faire du premier époux repenti le Dieu du Fourneau, ou Génie du Foyer. C’est lui qui, quelques jours avant le Nouvel An, monte au ciel, assis sur une carpe, pour aller faire à l’Empereur de Jade un rapport sur la famille chez qui il séjourne. Dans certaines versions, la carpe se transforme en dragon au moment où elle se trouve entre la terre et le ciel.

Il est donc très important d’amadouer, lors de la cérémonie, celui qui, par son rapport, va influencer les événements de l’année à venir. On brûle de l’encens, on lui fait des offrandes sucrées, qu’on colle parfois en Chine directement sur la bouche de sa représentation, on sacrifie une carpe pour aider au voyage (parfois deux, une pour l’aller, l’autre pour le retour), ou l’on en rejette, notamment au Viet Nam, dans les rivières. Ce rituel du Génie du Foyer/Dieu du Fourneau lance véritablement les célébrations de la Fête du Printemps.

(www.agoravox.fr)

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