Accueil Espace Bouddhiste Société La bibliothèque de Villiers Le Bel

La bibliothèque de Villiers Le Bel

80
0

LA BIBLIOTHEQUE DE VILLIERS LE BEL

Dans la nuit du 26 au 27 Novembre, il y a eu une bibliothèque incendiée à Villiers le Bel.

Au-delà du jugement et de l’opinion toujours si prompts à sortir,

au-delà de ces lois indispensables qui régissent les sociétés,

cela m’a rappelé un poème de Victor Hugo sur la beauté du livre, de la connaissance,

et finalement sur l’ascèse d’un chemin fait de poupées russes intérieures

vers une vérité jamais acquise et toujours plus belle.

Aude Guée


Victor_hugo.gifA QUI LA FAUTE ?

– Tu viens d’incendier la Bibliothèque ?

– Oui, J’ai mis le feu là.

– Mais c’est un crime inouï !

Crime commis par toi contre toi-même, infâme !

Mais tu viens de tuer le rayon de ton âme !

C’est ton propre flambeau que tu viens de souffler !

Ce que ta rage impie et folle ose brûler,

C’est ton bien, ton trésor, ta dot, ton héritage !

Le livre, hostile au maître, est à ton avantage.

Le livre a toujours pris fait et cause pour toi.

Une bibliothèque est un acte de foi

Des générations ténébreuses encore

Qui rendent dans la nuit témoignage à l’aurore.

Quoi ! Dans ce vénérable amas de vérités,

Dans ces chefs d’œuvres pleins de foudre et de clartés,

Dans ce tombeau des temps devenu répertoire,

Dans les siècles, dans l’homme antique, dans l’histoire,

Dans le passé, leçon qu’épelle l’avenir,

Dans ce qui commença pour ne jamais finir,

Dans les poètes ! Quoi, dans ce gouffre des bibles,

Dans le divin monceau des Eschyles terribles,

Des Homères, des Jobs, debout sur l’horizon,

Dans Molière, Voltaire et Kant, dans la raison,

Tu jettes, misérable, une torche enflammée !

De tout l’esprit humain tu fais de la fumée !

As-tu donc oublié que ton libérateur,

C’est le livre ? Le livre est là, sur la hauteur ;

Il luit ; parce qu’il brille et qu’il les illumine,

Il détruit l’échafaud, la guerre, la famine ;

Il parle, plus d’esclave et plus que paria.

Ouvre un livre, Platon, Milton, Becaria ;

Lis ces prophètes, Dante, ou Shakespeare, ou Corneille ;

L’âme immense qu’ils ont en eux, en toi s’éveille ;

Ebloui, tu te sens le même homme qu’eux tous ;

Tu deviens en lisant grave, pensif et doux ;

Tu sens dans ton esprit tous ces grands hommes croître,

Ils t’enseignent ainsi que l’aube éclaire un cloître ;

A mesure qu’il plonge plus en ton cœur plus avant ;

Leur chaud rayon t’apaise et te fait plus vivant ;

Ton âme interrogée est prête à leur répondre ;

Tu te reconnais bon, puis meilleur ; tu sens fondre

Comme la neige au feu, ton orgueil, tes fureurs,

Le mal, les préjugés, les rois, les empereurs !

Car la conscience en l’homme arrive la première,

Puis vient la liberté. Toute cette lumière,

C’est à toi, comprends donc, et c’est toi qui l’éteins !

Les buts rêvés par toi sont par le livre atteints !

Le livre en ta pensée entre, il défait en elle

Les liens que l’erreur à la vérité mêle,

Car toute conscience est un nœud gordien.

Ta haine, il la guérit ; ta démence, il te l’ôte.

Voilà ce que tu perds, hélas, et par ta faute !

Le livre est ta richesse à toi ! C’est le savoir,

Le droit, la vérité, la vertu, le devoir,

Le progrès, la raison dissipant tout délire,

Et tu détruis cela, toi !


– Je ne sais pas lire.

Victor Hugo, Juin 1871.






Chers Buddhachannellistes,

dites-vous ce que vous en pensez.

Réagissez par des réactions pertinentes, des propositions concrètes.

Comment pansez les plaies de notre société ?

Comment augmenter le seuil de culture ?

Est-ce une des solutions ? Y en a t-il d’autres?

Pour répondre, cliquez sur « répondre à cet article ».

Previous articleDalai Lama: les Enjeux de sa Réincarnation
Next articleLes Aventures de Sophie et d’Orélie